PORT-AU-PRINCE, mardi 17 décembre 2024 – L’Hôpital Bernard Mevs, l’un des rares centres hospitaliers encore en activité dans la région métropolitaine de Port-au-Prince, a été la cible d’une attaque incendiaire perpétrée par des membres de l’organisation terroriste “Viv Ansanm,” dirigée par l’ancien policier Jimmy Chérizier, alias Barbecue. Cet acte de violence, survenu dans la nuit du lundi 16 au mardi 17 décembre 2024, illustre l’escalade du chaos orchestré par ces groupes armés qui continuent de semer la terreur à travers la région métropolitaine de Port-au-Prince et l’Artibonite.
Après avoir reçu de nombreuses menaces de représailles, l’hôpital a vu ces menaces se concrétiser dans les flammes et la destruction. Selon les frères Marlon et Jerry Bitar, responsables de l’établissement, l’attaque a causé des dommages catastrophiques. « Le laboratoire, la salle d’imagerie et le bloc opératoire ont été ravagés par les flammes. Nous craignons la destruction totale de l’hôpital Bernard Mevs », ont-ils déclaré avec amertume.
La perte de cet hôpital, pilier du système de santé haïtien, met en lumière les profondes failles d’un secteur médical déjà exsangue dans un pays de plus de 12 millions d’habitants où l’accès aux soins est un luxe. Bernard Mevs, qui assurait des soins critiques et des services d’urgence 24 heures sur 24, représentait l’un des rares espoirs pour une population souvent abandonnée à elle-même. En plus de répondre aux urgences, il offrait une gamme complète de services médicaux, allant de la chirurgie à la néonatologie, en passant par la neurologie, l’oncologie, et même des programmes de prévention communautaire.
L’attaque de “Viv Ansanm” n’est pas seulement un acte de vandalisme contre une infrastructure médicale ; elle symbolise l’effondrement systémique auquel le pays est confronté. Déjà fragilisé par une couverture médicale limitée et inefficace, Haïti est désormais en proie à une violence incontrôlée où même les hôpitaux, espaces censés être protégés en toutes circonstances, deviennent des cibles. Ces actes viennent aggraver une situation sanitaire où des maladies comme le choléra, la tuberculose, le paludisme et le VIH continuent de faire des ravages, faute de structures fonctionnelles pour les traiter.
L’Hôpital Bernard Mevs, présent depuis trois décennies, était bien plus qu’un centre hospitalier. Il incarnait un modèle de résilience dans un environnement chaotique, offrant des soins intensifs pour adultes, enfants et nouveau-nés, avec des équipements modernes tels que des scanners et des laboratoires performants. En outre, il servait de plateforme pour les équipes médicales internationales et le personnel haïtien en formation, jouant un rôle crucial dans la lutte contre les carences du système de santé.
La destruction partielle de cet établissement marque un nouveau recul pour le secteur de la santé en Haïti, déjà incapable de répondre aux besoins de la population. Tandis que les groupes armés comme “Viv Ansanm” imposent leur loi dans de vastes zones du pays, les institutions, déjà précaires, s’effondrent sous le poids combiné de la violence, de l’instabilité et de l’abandon.
Dans un contexte où la criminalité dépasse les limites du tolérable, l’attaque contre Bernard Mevs illustre tragiquement les conséquences d’un État absent, incapable de protéger les infrastructures essentielles. Pour un pays en quête de survie, chaque perte d’un centre hospitalier représente une condamnation pour des milliers de vies. Cette tragédie est un rappel brutal que la santé publique ne peut prospérer dans le chaos, et que la résilience d’institutions comme Bernard Mevs a ses limites face à l’indifférence et à la terreur.