PORT-AU-PRINCE, mercredi 26 février 2025– Dans son Plan de Réponse Humanitaire 2025 rendu public ce mercredi 26 février 2025, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA) alerte sur une situation humanitaire catastrophique en Haïti. Près de la moitié de la population, soit six millions de personnes, a aujourd’hui besoin d’une assistance d’urgence. La crise sécuritaire, l’effondrement des services de base et l’insécurité alimentaire atteignent un niveau critique, tandis que l’ONU estime nécessaire une aide financière de 908,2 millions de dollars pour soutenir 3,9 millions de personnes dans les mois à venir.
L’année 2024 a été marquée par une intensification des violences armées, plongeant la population dans une situation de souffrance extrême. L’OCHA souligne que 5 600 personnes ont été tuées, soit une augmentation de 20 % par rapport à l’année précédente. Les enlèvements se sont multipliés, avec 1 500 cas recensés, et les violences basées sur le genre ont atteint un niveau critique avec 5 857 cas signalés, dont 69 % d’agressions sexuelles. La montée en puissance des groupes armés a forcé plus d’un million de personnes à fuir leur domicile, ce qui représente 9 % de la population haïtienne. Les déplacés internes sont principalement concentrés en province, tandis que 25 % d’entre eux se trouvent à Port-au-Prince, où la violence est particulièrement aiguë.
La crise alimentaire s’aggrave, menaçant la survie de millions de personnes. Selon l’OCHA, 5,5 millions d’Haïtiens sont désormais en insécurité alimentaire aiguë, un chiffre en hausse de 11 % depuis mars 2024. Parmi eux, 2 millions sont en situation d’urgence alimentaire et 6 000 personnes font face à une catastrophe alimentaire. Cette situation résulte directement de l’impact des violences sur la production agricole et les chaînes d’approvisionnement, de la flambée des prix des denrées alimentaires et des obstacles entravant l’acheminement de l’aide humanitaire dans les zones sous contrôle des groupes armés.
L’accès aux services essentiels continue de se détériorer. L’OCHA relève que seulement 27 % des hôpitaux du pays sont pleinement fonctionnels, un chiffre encore plus bas dans la région métropolitaine de Port-au-Prince. L’accès à l’eau potable est également gravement compromis, avec 23 % des déplacés internes vivant dans des sites informels où l’eau n’est pas traitée. La situation éducative est tout aussi dramatique, avec 900 écoles fermées, privant 150 000 élèves et 4 000 enseignants de toute activité scolaire. À Port-au-Prince, la présence des groupes armés empêche 16 % des enfants d’aller à l’école, une proportion qui grimpe à 43 % dans la commune de Cité Soleil.
La crise migratoire vient aggraver la situation. En 2024, 200 000 Haïtiens ont été expulsés de la République dominicaine, un chiffre qui pourrait atteindre 350 000 en 2025. Ces expulsions massives interviennent alors que les infrastructures nationales sont en ruine et que les conditions de vie des populations vulnérables se détériorent à grande vitesse.
Les catastrophes naturelles accentuent encore la précarité. Si Haïti a échappé aux cyclones en 2024, des pluies torrentielles en novembre et décembre ont provoqué des inondations dans six départements, touchant 330 000 personnes. L’OCHA rappelle que le pays reste extrêmement exposé aux aléas climatiques, ce qui complique davantage l’acheminement de l’aide humanitaire.
Face à cette crise d’une ampleur inédite, l’ONU et ses partenaires ont mis en place un Plan de Réponse Humanitaire 2025 visant à fournir une aide d’urgence à près de quatre millions de personnes. Ce plan s’appuie sur trois axes majeurs : la protection des populations vulnérables, la fourniture d’une aide humanitaire multisectorielle et le renforcement de la résilience communautaire. L’extension du Mécanisme de Réponse Rapide (RRM) à de nouvelles régions, le renforcement des dispositifs de protection contre l’exploitation et les abus sexuels (PEAS) et la création d’un fonds régional de réponse humanitaire font partie des initiatives mises en place pour maximiser l’impact des actions sur le terrain. Un projet d’action anticipatoire pour les tempêtes tropicales et ouragans a également été lancé, avec une enveloppe de 4 millions de dollars prête à être déboursée en cas de catastrophe.
L’OCHA insiste sur l’urgence d’une mobilisation internationale rapide. Les fonds nécessaires pour répondre aux besoins de la population s’élèvent à 908,2 millions de dollars, un montant qui dépasse largement les ressources allouées ces dernières années. Sans un engagement immédiat des bailleurs de fonds, la crise humanitaire en Haïti risque d’atteindre un niveau encore plus dramatique en 2025.