PORT-AU-PRINCE, vendredi 15 septembre 2023- Ex-conseiller du président Jovenel Moïse, Guichard Doré estime que la première prise haïtienne sur la rivière Massacre, est un dossier d’intérêt national.
Cependant, il souligne que “les premières mesures du gouvernement d’Ariel Henry sur le conflit haitiano-dominicain né du bon droit des Haïtiens de faire une première prise sur la rivière Massacre, ont montré que le gouvernement traite ce dossier en amateur.”
“Les Dominicains ont déjà fait 11 prises et installé 20 pompes de grande capacité sur la rivière Massacre. Les Haïtiens sont dans leur bon droit de faire une prise sur cette rivière pour irriguer 3000 hectares de terre sur les 10000 hectares terre de la plaine de Marie Bahoux”, déclare-t-il.
Selon Doré, “par sa décision d’ériger un mur sur la frontière au niveau de Dajabón, le Président Abinader a privé les paysans de Ouanaminthe la possibilité de faire leur récolte. Les paysans qui ont vu leurs terres privées d’eau n’ont pas d’autre choix que de terminer les travaux du canal permettant la prise haïtienne sur la rivière Massacre afin de continuer les activités agricoles dans la plaine de Marie Bahoux”, soutient M. Doré.
“Haïti est dans son bon droit, poursuit-il, ajoutant que les traités internationaux sur le partage des eaux transfrontalières exigent et font obligation d’un partage égal de l’utilisation des eaux séparant deux pays.”
Il rappelle que l’article 10 du Traité de paix, d’Amitié et d’Arbitrage du 20 février 1929 signé entre la République d’Haiti et la République dominicaine dispose : « En raison de ce que des rivières et autres cours d’eau naissent sur le territoire d’un des deux États, traversent le territoire de l’autre, ou leur servent de limites, les deux Hautes Parties contractantes s’engagent à ne faire ni consentir aucun ouvrage susceptible soit de changer le cours naturel de ces eaux, soit d’altérer le débit de leurs sources. »
Selon lui, “cette disposition ne pourra s’interpréter à priver l’un ou l’autre des deux États du droit d’user d’une manière juste et équitable, dans les limites de leurs territoires respectifs, desdites rivières et autres cours d’eau pour l’arrosage des terres et autres fins agricoles ou industrielles. » Donc, Haïti ne viole pas le traité de 1929”, ajoute-t-il.
« Suite aux déclarations intempestives du Président Abinader de la République dominicaine, le gouvernement d’Ariel Henry devrait convoquer l’Ambassadeur dominicain accrédité en Haïti afin qu’il puisse fournir des explications sur le bien-fondé et les motifs des mesures prises par son pays. Malheureusement, le Premier ministre Henry a préféré, contre toute attente, d’envoyer une délégation composée de techniciens pour négocier un dossier politique, stratégique et de sécurité nationale qui est sur le bureau du Président dominicain et qui a fait l’objet de plusieurs réunions du Conseil de sécurité nationale de la République dominicaine. Inégalité de traitement et inégalité de vue et de compréhension des enjeux stratégiques du dossier de la rivière Massacre », déclare Guichard Doré.
Particulièrement critique vis-à-vis du comportement belliqueux d’Abinader, Doré souligne qu’en pleine négociation avec l’équipe dominicaine, la délégation haïtienne a constaté que le Président dominicain sur un ton martial a mis en exécution l’ultimatum qu’il a lancé à Haïti.
“En fermant les frontières en pleine négociation, Abinader exprime un mépris pour les membres de la délégation haïtienne et tente de leur priver les moyens pour retourner au pays s’ils n’avaient pas prévu de terminer la négociation avant vendredi”, indique-t-il.
Doré estime que la diplomatie haïtienne a commis beaucoup de maladresses dans ce dossier de sécurité nationale. “D’abord, souligne-t-il, Haïti ne devrait pas envoyer une délégation en République dominicaine. Cette délégation n’avait absolument rien à faire en territoire dominicain”, soutient l’ex-conseiller de Moïse.
De plus, ajoute-t-il, “le dossier de la rivière Massacre est un dossier politique et de sécurité nationale, il devait être traité d’abord par le Conseil National de Sécurité et de Défense (CNSD) afin de bien mesurer et de saisir toutes les acuités du dossier précisant que le décret de 25 novembre 2020 que Jovenel Moise a pris pour instituer le CNSD est précis sur ce point.”
“La délégation haïtienne dépêchée par le gouvernement de Henry devait laisser ipso facto le territoire dominicain. Par son ultimatum à Haïti, suivi d’exécution, le Président Abinader, ignorant l’histoire des deux pays et niant la portée politique désastreuse de sa décision, a tout simplement mis fin à toute forme de négociation”, estime Doré.
Il affirme qu’il Haïti n’a pas à fournir des explications aux Dominicains.
“Si négociation, il y en aura, la Chancellerie haïtienne devra demander au gouvernement dominicain de lui présenter le dossier technique des 11 prises qu’il a déjà faites sur la rivière Massacre. Le droit international est du côté d’Haiti”, selon Doré