‘‘Gestion défaillante du programme d’urgence multisectoriel du gouvernement d’Ariel Henry’’: La CSCCA préconise des correctifs majeurs…

COUR DES COMPTES ET DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF (CSCCA)

PORT-AU-PRINCE, vendredi 21 juin 2024– Dans un rapport récent, la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSCCA) a mis en évidence plusieurs points critiques concernant la gestion du Programme d’Urgence Multisectoriel (PUM). Ce programme, lancé en avril 2023, a pour objectif de lutter contre l’insécurité alimentaire et d’étendre les dispositifs de protection sociale en Haïti, avec un financement conjoint du Trésor Public et du Fonds Monétaire International (FMI) via le mécanisme Food Shock Window (FSW).

L’évaluation de la CSCCA a révélé que le PUM souffre d’un manque de directives stratégiques et d’un plan d’opérations global ou sectoriel conforme à la réglementation. Le dispositif organisationnel est jugé inadéquat et la coordination du programme est défaillante, en particulier en matière de suivi, de réalisation des projets, de contrôle budgétaire et de rapportage. Les mécanismes de suivi-évaluation n’ont pas été mis en place, et aucun rapport de suivi n’a été communiqué trois mois après la clôture de l’exercice.

Concernant la conformité financière et opérationnelle des dépenses, le rapport souligne que le contrôle interne du PUM, dépendant des institutions publiques impliquées, présente de nombreuses lacunes. Il existe un risque élevé de non-contrôle financier quant à l’existence des disponibilités pour les activités, l’exactitude des évaluations des dépenses, et la régularité des dépenses vis-à-vis de la réglementation. De plus, certaines dépenses ne sont que partiellement documentées et les dépenses de personnel sous forme de gratifications sont souvent discrétionnaires en l’absence d’un plan de ressources.

Les crédits annuels octroyés aux ministères ne se traduisent pas systématiquement en budgets opérationnels pour les activités prévues. Le manque d’informations adéquates sur les actions mises en œuvre entrave la responsabilité et peut pénaliser les bénéficiaires. Le principal instrument du gouvernement pour les programmes de protection sociale, le SIMAST, présente de nombreuses limitations. Bien que le programme accorde une attention particulière aux femmes enceintes et aux personnes âgées, les informations fournies sur les prestations ne permettent pas d’évaluer leur impact.

La CSCCA conclut que les pratiques de gestion adoptées présentent des risques considérables pour l’atteinte des objectifs du PUM et pour la probité financière des projets. Des efforts sont nécessaires pour renforcer la responsabilité en matière de gestion des projets d’investissement publics et pour améliorer le système de gestion du PUM ainsi que le suivi et la réalisation des projets financés. Parmi les recommandations, la Cour préconise de repenser le système de gestion du programme et le cadre de responsabilisation de sa coordination, de réviser les documents de projet sectoriels, de mettre en place des normes et procédures de gestion appropriées, et de renforcer les capacités de préparation et de gestion des projets.

Elle recommande également l’élaboration d’un plan de ressources par chaque institution concernée, la finalisation du SIMAST, la sensibilisation des acteurs locaux et des communautés, et la dotation en ressources humaines appropriées pour le Ministère des Affaires Sociales et du Travail (MAST). Une campagne d’informations bien coordonnée à l’échelle nationale sur le PUM est également suggérée, ainsi que la réalisation d’audits internes ponctuels pour vérifier l’adéquation des contrôles internes et la conformité des dépenses.