PORT-AU-PRINCE, lundi 13 novembre 2023– Le président élu de l’accord de Montana, Fritz Alphonse Jean s’est dit étonné de la prise de position de la représentante du secrétaire général des Nations-Unies en Haïti, Marian Isabel Salvador, en faveur de l’organisation d’élections en Haïti par le pouvoir en place.
La semaine dernière, Mme Salvador a déclaré sur son compte X (ancien Twitter) : « Le seul chemin pour sortir d’une transition politique ce sont des élections démocratiques, transparentes et participatives. On ne sort pas d’une transition par une nouvelle transition […]. Ceux qui proposent une « nouvelle transition » s’éloignent des principes démocratiques et veulent imposer leurs intérêts individuels en oubliant les intérêts du peuple ».
Déjà, le 23 octobre dernier, elle avait tenu les mêmes propos lors d’une intervention au conseil de sécurité de l’ONU : « Les élections sont la seule voie et le seul impératif pour restaurer les institutions démocratiques en Haïti. Seules la démocratie et la primauté du droit peuvent constituer la base à partir de laquelle Haïti peut progresser vers le développement et la croissance », a-t-elle ajouté.
Intervenant dimanche lors d’une conférence de presse, Fritz Jean a assimilé cette prise de position de Mme Salvador a du mépris pour les haitiens qui, a-t-il dit, ont opté pour une transition de rupture qui créera les conditions indispensables à la tenue de bonnes élections dans les conditions de sécurité nécessaires.
Il dit ne pas comprendre comment ‘‘un gouvernement irresponsable qui assiste en spectateur à la descente aux enfers du pays et de ses institutions n’assurant aucun service à la population, aux gangs armés qui massacrent les citoyens, pillent, violent et incendient les biens des haitiens, pourrait prétendre pouvoir organiser des élections.’’
L’ex-gouverneur de la banque centrale a souligné également que ‘‘le pouvoir en place s’est révélé incapable d’assurer pleinement la réouverture des classes, de garantir la sécurité de la population prise en otage par les bandes criminelles qui imposent leurs lois et contrôlent les routes nationales privant les citoyens de leur liberté de mouvement.’’
Selon M. Jean, La position de Isabel Salvador est un acte de mépris vis-à-vis des revendications des haitiens qui aspirent à l’autodétermination et à de meilleures conditions de vie dans leur pays afin d’être les acteurs de son développement.
« C’est ce mépris, a-t-il déclaré, qui a poussé le président dominicain Luis Abinader a adopter un train de mesures de représailles injustifiées dans une tentative d’affamer les haïtien en fermant toutes les frontières de son pays suite aux travaux de construction d’un canal d’irrigation sur la rivière Massacre ».
« Heureusement, les dominicains se sont heurtés à la résistance et à la vigilance du peuple haïtien, s’est-il réjoui, arguant qu’ils voulaient nous mettre à genoux et que cela ne passera jamais. »
Insistant sur la nécessité d’engager des réformes, notamment sur le plan économique, Fritz Jean a déploré la fuite massive de cerveaux haitiens entrainant également une importante fuite de capitaux.
Selon l’économiste, les dizaines de milliers d’Haitiens qui ont quitté le pays, ces derniers temps, en quête d’une meilleure vie vers les Etats-Unis en transitant par le Nicaragua, auraient déboursé au moins 91 millions de dollars américains pour ce voyage.
Il a également déploré que la contrebande fait perdre au pays, chaque année, l’équivalent d’un (1) milliard de dollars américains.
Selon Fritz Jean, les sanctions internationales imposées à certains acteurs économiques qui auraient contribués au rabougrissement de l’économie du pays par la corruption, constituent une fenêtre d’opportunité pour relancer l’économie nationale en consentant des investissements dans des secteurs de production et créateurs de richesses.
« Tout cela, a-t-il souligné, doit passer nécessairement par remembrement des institutions du pays et l’épuration du système judiciaire également gangrené par la corruption. »