“Entre progrès et chaos : Le Salvador établit un record avec 114 homicides en 2024, le plus bas jamais enregistré, tandis qu’Haïti dépasse 5 000 morts liées aux gangs et fait face à une crise humanitaire sans précédent”…

SAN SALVADOR, (Salvador) jeudi 2 janvier 2025– Le Salvador a terminé l’année 2024 avec un record historique de 114 homicides, poursuivant des progrès notables en matière de sécurité grâce à une deuxième année complète sous un état d’urgence qui a conféré des pouvoirs extraordinaires au gouvernement, tout en restreignant certains droits fondamentaux.

Le président Nayib Bukele a déclaré sur la plateforme X que ce chiffre, annoncé mercredi par le bureau du procureur général de ce petit pays d’Amérique centrale, faisait du Salvador la nation la plus sûre de l’hémisphère occidental.

Bien que tous les pays n’aient pas encore publié leurs statistiques annuelles pour 2024, le taux de 1,9 homicide pour 100 000 habitants, avancé par Bukele, placerait le Salvador en dessous des chiffres rapportés par tout autre pays latino-américain en 2023. Toutefois, ce total officiel n’inclut pas les cinq présumés membres de gangs tués lors d’affrontements avec les forces de sécurité.

En mars 2022, les gangs de rue puissants et notoires du Salvador avaient tué 62 personnes en quelques heures. En réponse, le Congrès avait accordé à l’administration Bukele un « état d’exception », suspendant certains droits constitutionnels et élargissant les pouvoirs de la police pour arrêter et détenir des suspects.

Depuis le début de cette répression, plus de 83 000 personnes ont été arrêtées, la majorité étant emprisonnées sans procès. Bukele a affirmé que 8 000 innocents avaient été libérés après vérification. Cependant, des organisations de défense des droits civils rapportent que 354 détenus sont morts en garde à vue pendant cette opération.

Malgré les critiques sur les atteintes aux libertés, les améliorations en matière de sécurité ont considérablement renforcé la popularité de Bukele. Pendant des années, de nombreux Salvadoriens vivaient dans la peur des gangs qui contrôlaient des pans entiers du territoire, pratiquant extorsions, assassinats et recrutements forcés.

En 2015, le Salvador avait enregistré 6 656 homicides, ce qui en faisait l’un des pays les plus dangereux au monde. En 2023, ce chiffre avait chuté à 214. Ces avancées soulèvent inévitablement la question de la nécessité de maintenir l’état d’urgence, une mesure que Bukele et ses ministres justifient par des objectifs qu’ils considèrent encore inachevés. Le Congrès, dominé par le parti de Bukele et ses alliés, continue de renouveler ces pouvoirs spéciaux chaque mois.

Le contrôle répressif des gangs rendait autrefois difficile et dangereux le simple fait de se déplacer entre quartiers, y compris pour travailler. Aujourd’hui, les habitants affirment pouvoir marcher dans leurs quartiers sans craindre pour leur sécurité.

En février 2024, Bukele a remporté une victoire éclatante, obtenant un second mandat de cinq ans malgré une interdiction constitutionnelle de réélection consécutive. Une Cour suprême favorable à son administration avait autorisé cette exception.

En Haïti, la situation sécuritaire s’est considérablement détériorée. Des gangs ont orchestré des attaques coordonnées sur des institutions étatiques et des infrastructures critiques à Port-au-Prince, y compris des commissariats, des prisons et l’aéroport international, qui a été temporairement fermé. Ces violences ont atteint un nouveau sommet en décembre 2024 avec un massacre à Cité Soleil, où plus de 180 personnes ont été tuées.

Selon Volker Türk, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, le nombre total de morts liées aux gangs en 2024 dépasse 5 000.

Le climat d’insécurité a aggravé la crise humanitaire. Le déplacement interne touche désormais plus de 700 000 personnes, selon l’Organisation internationale pour les migrations. Près de la moitié de la population fait face à une insécurité alimentaire aiguë, plaçant Haïti parmi les zones de famine les plus préoccupantes au monde, selon le Programme alimentaire mondial. De plus, les inondations de fin 2024 ont causé d’importants dégâts, amplifiant les souffrances des populations déjà vulnérables.

Le déploiement de la Mission de soutien à la sécurité (MSS), qui compte actuellement 400 policiers sur les 2 500 prévus, reste insuffisant pour contenir la violence des gangs. Reconnaissant ces limites, le Conseil de sécurité a renouvelé son autorisation en septembre 2024 par la résolution 2751 et a encouragé un financement supplémentaire pour renforcer la mission.

Par ailleurs, une proposition visant à transformer la MSS en une opération de maintien de la paix, financée par le budget régulier des Nations Unies, a suscité des débats houleux. Si les États-Unis et l’Équateur ont soutenu cette idée, la Chine et la Russie s’y sont opposées, évoquant les échecs passés des missions onusiennes en Haïti et l’instabilité persistante.

Le 29 novembre 2024, le Conseil a demandé au Secrétaire général de fournir des recommandations stratégiques sur les options de soutien des Nations Unies à Haïti, en tirant parti des leçons apprises des précédentes missions et des développements politiques actuels.

Sur le plan des droits humains, un rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies, publié en septembre 2024, documente une propagation des violences au-delà de Port-au-Prince. Le Haut-Commissaire Volker Türk a appelé à des actions concrètes pour renforcer la police nationale haïtienne et soutenir la MSS. Il a également insisté sur l’urgence de rétablir l’État de droit et d’organiser des élections en conformité avec le droit international.

La question du trafic d’armes reste critique. En septembre 2024, le Comité des sanctions sur Haïti a noté dans un rapport que ce commerce illégal se poursuit sans relâche, alimentant les violences et les violations massives des droits humains. La résolution 2752, adoptée en octobre 2024, prolonge pour un an le régime de sanctions afin de contrer ces activités.