Le second tour de l’élection présidentielle française 2022 opposera Emmanuel Macron, président sortant et candidat pour La République en Marche !, à Marine Le Pen, candidate d’extrême droite du Rassemblement national. Un match retour bien différent de celui de 2017. Durant ces cinq années, les deux prétendants ont chacun fait évoluer leur image.
Paris, dimanche 10 avril 2022– Emmanuel Macron affrontera Marine Le Pen au second tour de l’élection présidentielle. L’annonce n’étonnera pas ceux qui restaient, des semaines durant, les yeux rivés sur les sondages, mais elle n’a pas du tout les mêmes implications qu’il y a cinq ans. L’un est devenu président de la République, l’autre a dû trouver une nouvelle stratégie pour revenir en force. En cinq ans, les deux adversaires ont louvoyé politiquement pour construire leur crédibilité, tout en évitant le plus possible de se ressembler. Aujourd’hui, l’écart des intentions de vote au second tour entre les deux candidats n’a jamais été aussi étroit et tout reste possible.
Partie de loin
Il y a cinq ans, le Rassemblement national (RN), à l’époque Front national, espérait devenir la première force politique du pays. Marine Le Pen l’avait appelé de ses vœux à l’annonce de la victoire d’Emmanuel Macron, le 7 mai 2017 : « Les Français ont désigné l’alliance patriote et républicaine comme la première force d’opposition au projet du nouveau président. »
Pourtant, dans ses propres rangs, le doute existait. Certains la disaient finie, après sa terrible performance durant le débat d’entre-deux-tours. Sous l’œil mi-médusé, mi-amusé d’Emmanuel Macron, Marine Le Pen s’était écroulée en direct, perdant ses moyens, cherchant dans ses dossiers. Beaucoup considéraient alors que la candidate RN enterrait définitivement ses chances de l’emporter, et les résultats au second tour leur ont donné raison : deux tiers des votants ont choisi Emmanuel Macron.
Aux élections législatives de juin 2017, le Rassemblement national obtient six députés. Difficile de faire valoir le statut de premier parti d’opposition dans ces conditions : Les Républicains en ont 93, la France insoumise (LFI) 17. Là où Marine Le Pen est la plus emblématique députée du RN, LFI peut mettre en avant Jean-Luc Mélenchon, mais aussi Adrien Quatennens, Alexis Corbière, ou encore François Ruffin, très audibles dans la contestation du pouvoir nouvellement en place. De son côté, le rouleau compresseur LaREM, avec plus de 300 députés affiliés, donnait à Emmanuel Macron une pleine liberté d’action.
Changer d’image
L’année suivante, le parti d’extrême droite amorce sa mue et sa présidente une renaissance. Changement de nom, changement de visuels, Marine Le Pen tente, à l’image de son parti, d’adoucir sa flamme nationaliste. Une stratégie parfaitement adaptée pour elle, un peu moins pour sa formation. Après des élections européennes plutôt réussies, où le Rassemblement national gagne des voix (deux millions de plus qu’aux législatives de 2017), mais n’augmente pas en proportion (23,31%, contre 23,86% en 2014), le parti stagne aux élections municipales de 2020.
Marine Le Pen, d’un point-de-vue personnel, évite les dérapages médiatiques et se met en scène au quotidien, là où Emmanuel Macron, naturellement plus exposé, peine à se départir de son image de « président des riches ». Si les résultats aux élections ne sont pas aussi bons qu’espéré, la présidente du parti d’extrême droite peut compter sur les aléas de l’actualité. L’ex-président de la République François Hollande avait dû faire face à la vague d’attentats de 2015, Emmanuel Macron aura le mouvement social des « gilets jaunes » en novembre 2018 et la pandémie de Covid-19. Deux crises compliquées à gérer pour le président de la République, qui donneront à Marine Le Pen toute latitude pour critiquer son principal adversaire.
Emmanuel Macron est arrivé au pouvoir au détriment de deux forces politiques majeures : le Parti socialiste et Les Républicains. Se proclamant ni de gauche, ni de droite, le candidat essaye un temps de gouverner en équilibriste, avant d’assumer une politique classée à droite. Baisse des APL pour les étudiants, abandon de l’impôt sur la fortune, réforme de la SNCF et du code du travail… ses mesures ne se destinent pas à un électorat de gauche. Il échouera néanmoins à faire passer sa réforme des retraites, ralentie par les protestations populaires et la crise sanitaire.
S’emparant des thèmes de l’immigration et de la sécurité, chers à l’extrême droite, il dénonce l’islamisation de la société après l’assassinat du professeur Samuel Paty, et interdit dans la foulée de nombreuses associations taxées d’islamisme. Son ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin défend une ligne dure sur l’immigration, qui se retranscrit sur le terrain.
Source :RFI