ECC appelle l’ULCC à diligenter une enquête sur les ordonnateurs ayant administré les fonds publics alloués à la lutte anti-Covid-19

COUR DES COMPTES ET DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF (CSCCA)

PORT-AU-PRINCE, mercredi 29 juin 2022– Analysant le rapport d’audit de la cour supérieur des comptes et du contentieux administratif (CSCCA) sur la gestion de la réponse gouvernementale à la pandémie de Covid-19, Ensemble contre la Corruption (ECC) estime que les décideurs politiques ont mis de côté les normes administratives et comptables.

Dans son analyse, ECC dit observer que ce rapport d’audit a été diffusé en 2022, l’année même où la très influente de l’Administration de l’ex-Président Jovenel Moïse, Magalie Habitant (ex Directrice Générale de SMCRS), a été condamnée (solidairement avec les nommés Ralph René, directeur administratif, Rosemond Jolicoeur, comptable en chef, Jocelyn Borgella, Coordonnateur de Projet, ainsi que le comptable public, madame Guy Lafleur) à restituer au Trésor Public, la somme de trente-huit millions huit cent soixante-dix-neuf mille sept cent soixante-seize gourdes & 71 centimes (38 879 776. 71/100 Gourdes).

« Il est pénible de constater que les ordonnateurs publics ne tirent aucune leçon des conséquences de la corruption et du pillage des ressources publiques pour leur réputation personnelle ainsi que des membres de leur famille ni sur les tragédies des populations haïtiennes les plus vulnérables », écrit ECC.

L’organisation estime que les personnes directement impliquées dans la gestion de ces fonds, dont Michel Patrick Boisvert, ministre des finances, Pierre-Josué Agénor Cadet ex-ministre de l’éducation nationale, Marie Greta Roi Clément ex-MSPP, Nader Joiséus, ex-MTPTC,  Abner Septembre, Lauré Adrien, DG MSPP, Rameau Normil et Leeon Charles ex-DG de la PNH Jean Michel Silin, Wilson Edouard,  Meniol Jeune, Eude Lajoie et Astrel Joseph, sont appelées à rendre des comptes.

Publié début juin 2022, le rapport de la CSCCA a révélé que le Ministère de l’Economie et des Finances avait alloué la modique somme de 9 225 397 757.48 Gourdes répartie à divers ministères et autres institutions publiques, dont le MSPP, le MTPTC, le MDE, le MENFP, le FAES, la PNH et le GNCRS.

ECC affirme avoir déployé des efforts en vain pour tenter de comprendre les services offerts à la population et autres dispositifs mis en place par l’administration publique avec les allocations financières fournies aux ministères et autres institutions publiques. Aucune des entités en question n’a accepté de rencontrer ECC, souligne l’organisation dans son document.

Poursuivant son analyse, ECC déclare constater que les irrégularités administratives touchent la totalité des sept (7) institutions publiques ayant participé à la gestion des fonds dédiés au Covid-19.

« Un tel désordre administratif doit alarmer tous les citoyens, les experts comptables, les spécialistes en contrôle interne et externe, l’Ordre des Comptables Professionnels Agréés d’Haïti (OCPAH) etc. On ne peut plus accepter de vivre dans un Etat paria, un Etat voyou où les politiques décident de tout, sans respecter les normes » déclare ECC.

L’organisation anti-corruption souligne que le rapport de la CSCCA montre que tous les marchés sont faits de gré à gré, ajoutant que l’article 17 de la loi du 15 avril 2010 portant amendement de la loi sur l’état d’urgence du 9 septembre 2008 stipule : « en vertu de l’acte instaurant l’état d’urgence, le gouvernement passe les contrats qu’il juge nécessaires selon les procédures célères prévues par la réglementation sur les marches publiques ».

‘‘Les procédures célères n’excluent pas le contrôle à priori que donne la loi à la Cour Supérieure de Comptes et du Contentieux Administratif et la Commission Nationale des Marchés Publics car l’article 3-2 de la loi du 12 juin 2009 sur la passation des marchés publics précise clairement que les marchés publics découlant de l’application de la loi sur l’Etat d’Urgence ne sont exempts de cette loi’’, soutient ECC.

Aussi, ECC s’interroge-t-il sur la justification et le principe de la comptabilité publique haïtienne ayant permis au MEF d’allouer un surplus de 44.48% du montant demandé au MSPP. ‘‘De plus, poursuit ECC, le rapport d’audit mentionne que 1 967 117 542.35 Gourdes des dépenses du MSPP ne sont jusqu’à date justifiées et 403 301 733.32 de Gourdes ont des pièces justificatives irrégulières.’’

ECC recommande aux autorités de ‘‘mettre fin à la formule bien connue du « Passer Outre » mise en place par des décideurs politiques indélicats afin de faciliter le contournement des normes administratives et comptables en vigueur.’’

L’organisation souhaite qu’à court et à moyen terme, les autorités financières du pays sont appelées à développer des plans de formation et de supervision en utilisant toutes les ressources techniques disponibles internes et externes afin de renforcer le système comptable et toute l’administration publique.