PORT-AU-PRINCE, vendredi 4 octobre 2024- Le collectif “Ensemble Contre la Corruption” (ECC), qui regroupe plusieurs organisations de défense des droits humains et de justice en Haïti, a salué la récente transmission du rapport d’enquête menée par l’Unité de Lutte Contre la Corruption (ULCC) concernant un scandale de corruption touchant trois conseillers présidents, Smith Augustin, Emmanuel Vertilaire, et Louis Gérald Gilles, ainsi que l’ancien président du Conseil d’Administration de la Banque Nationale de Crédit (BNC), Raoul Pascal Pierre Louis. Ce rapport met en lumière de graves actes de malversation et d’abus de fonction qui ont secoué l’institution bancaire.
Le scandale a éclaté suite à une dénonciation de Raoul Pascal Pierre Louis, qui, dans une correspondance datée du 24 juillet 2024, adressée au Premier ministre Gary Conille, a révélé que les trois conseillers présidents avaient exigé une somme de cent millions (100,000,000) de gourdes en échange de sa reconduction à la tête du Conseil d’administration de la BNC. L’ULCC a confirmé, à travers son enquête, que cette somme exorbitante avait été demandée lors d’une rencontre organisée le 25 mai 2024, sous la supervision du conseiller Louis Gérald Gilles.
Le rapport de l’ULCC révèle également que face à l’impossibilité de réunir cette somme, Raoul Pascal Pierre Louis a proposé aux conseillers une série d’avantages indus, dont l’accès à des cartes de crédit de la BNC. Chacun des conseillers présidents a ainsi reçu une carte de crédit avec un plafond de vingt mille (20,000) dollars américains, tandis que Lonick Leandre, consul d’Haïti à Santiago, s’est vu attribuer une carte plafonnée à treize mille cinq cents (13,500) dollars américains. Ces cartes ont été utilisées de manière abusive pour des dépenses non justifiées, en dehors des procédures régulières de la BNC.
L’ECC, dans son communiqué, exprime sa satisfaction quant à l’impartialité des investigations menées par l’ULCC. Cependant, le collectif exprime ses préoccupations face à l’inaction des autorités compétentes. En effet, malgré la gravité des faits révélés, les conseillers présidents fautifs et les secteurs politiques qui les ont désignés ont, jusqu’à présent, ignoré les appels à des sanctions immédiates.
L’ECC rappelle que dès le 30 juillet 2024, à la suite de l’éclatement du scandale, il avait recommandé aux membres du Conseil Présidentiel de Transition (CPT) de prendre des mesures fortes contre les personnes impliquées. Cependant, les membres non éclaboussés par cette affaire ont opté pour le silence, laissant planer de sérieux doutes quant à leur volonté de lutter contre l’impunité des crimes financiers.
Le collectif appelle désormais l’appareil judiciaire haïtien, et en particulier le Commissaire du Gouvernement près le Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince, Lionel Constant Bourgoin, à mettre en mouvement l’action publique contre les principaux accusés. ECC exige que justice soit faite pour les actes d’abus de fonction, de versement de pots-de-vin et de corruption révélés par l’enquête.
L’ECC se dit également préoccupé par la gestion opaque des fonds alloués aux conseillers présidents pour leur service d’intelligence. Selon Smith Augustin, ces fonds ont été utilisés à des fins électoralistes, notamment pour financer des activités politiques en lien avec les secteurs ayant désigné ces conseillers. Le collectif estime qu’il est nécessaire d’étendre l’enquête pour identifier tous les bénéficiaires de ces pratiques illégales.
Compte tenu de l’ampleur de ce scandale, l’ECC réitère son engagement pour une moralisation de la vie publique en Haïti, rappelant que la corruption n’est pas une fatalité. Le respect des codes d’éthique et de déontologie doit être exigé des autorités étatiques et des fonctionnaires de l’administration publique.
ECC affirme que la lutte contre la corruption est essentielle pour remédier aux graves problèmes de pauvreté, de sous-développement et de violations des droits humains qui affligent Haïti. Le collectif appelle à une gouvernance transparente et à la mise en œuvre des outils nécessaires pour changer le cours de l’histoire contemporaine du pays.