Des paysans de Ouanaminthe dénoncent la prise illégale de possession des terres haïtiennes par la CODEVI…

Entree principale de la Codevi/image d'illustration...

OUANAMINTHE, dimanche 21 août 2022– En plus de la prise de possession illégale des terres haïtiennes, les paysans dénoncent également des de criminalité et de corruption de la CODEVI et de violation de l’intégrité du territoire haïtien par des soldats dominicains.

Dans une correspondance au président dominicain Luis Abinader, les paysans décrivent la CODEVI comme le modèle parfait de corruption, de crime financier transnational et de déstabilisation de l’État haïtien.

Ils soulignent qu’en 2002, ‘‘en complicité avec les acteurs financiers de la Société Financière Internationale (SFI), la CODEVI n’a respecté aucune norme d’investissement édictée par la Banque Mondiale.’’

Suivant la norme 5 de la Banque Mondiale, les paysans expropriés auraient dû être relocalisés avant que la CODEVI se soit installée à Ouanaminthe. ‘‘Ce qui n’a point été respecté. Les paysans ont été délocalisés, décapitalisés et relocalisés sur de nouvelles terres que 18 ans plus tard, à l’issue d’un procès emblématique.  Cette injustice scandaleuse et sans précédent doit être réparée’’, écrivent-ils.

Selon la correspondance, la CODEVI jouit d’un régime douanier et fiscal spécial en Haïti, en vertu de la loi du 9 juillet 2002 portant sur les Zones Franches. Cependant, soulignent les paysans, ‘‘en dépit de son paradis fiscal, la CODEVI refuse de verser mensuellement, en faveur de ses ouvriers, toutes les obligations salariales et patronales à l’Office d’Assurance Vieillesse (ONA) et à l’Office d’Assurance Accidents du Travail, Maladie et Maternité (OFATMA).’’

Ils ajoutent que les prélèvements des salaires des ouvriers dominicains, se trouvant sur le sol haïtien, ne sont pas comptabilisés dans les recettes de l’État haïtien, rappelant qu’en Haïti, la sécurité sociale des ouvriers nationaux et étrangers est une obligation légale.

« Les dominicains travaillant en Haïti sont astreints à payer des obligations fiscales en Haïti. Tout refus délibéré de s’y soumettre est un acte criminel », déclarent-ils.

Les paysans expliquent que la CODEVI déverse, quotidiennement, des tonnes de déchets dans un quartier dénommé Dilaire, dans une propriété non clôturée, à ciel ouvert. Ces déchets jonchent la route nationale numéro 6 et ne sont pas traités et ont provoqué le déplacement de certaines familles vulnérables à cause de la pollution et la dégradation effrénée de l’environnement.

Ils indiquent que des attaques de cancer, des maladies infantiles, des pertes en biodiversités, la destruction de la faune et de la flore en sont les conséquences les plus imminentes. Dans la rivière Massacre, la CODEVI déverse un volume impressionnant de matières fécales.

Les paysans déclarent : « Aujourd’hui, avec un salaire mensuel qui frise l’inhumanité, privation de sécurité sociale, non-assistance sociale, absence d’un programme d’assainissement et de contribution sociale réelle, absence des services sociaux de base au profit de ses employés et les désastres que la CODEVI a infligés à l’environnement haïtien sont irréversibles. Ouanaminthe enregistre une explosion démographique inversement proportionnelle à ses besoins sociaux, économiques et environnementaux les plus criants ».

Ils accusent la CODEVI de normaliser la concurrence déloyale en Haïti, ajoutant que cette compagnie est détentrice d’un droit d’exploitation industrielle encadrée par une loi.

‘‘Ce droit ne s’étend pas à toutes les activités économiques. Pourtant, la CODEVI se lance dans le commerce local. Elle est distributrice de gaz propane et propriétaire de restaurants, sans égard à son secteur d’activité.  La CODEVI se sert de ses exonérations fiscales pour commercer des produits non autorisés par un droit d’exploitation. Cette pratique nuit aux entrepreneurs haïtiens qui ne jouissent, eux, d’aucun privilège et, de surcroit, payent d’irritantes taxes, tout en composant avec le prix du marché’’, soutiennent-ils.

Les paysans soulignent à l’attention d’Abinader que ‘‘la CODEVI veut obtenir des droits sur de nouvelles terres afin d’expandre son territoire, sans aucune étude d’impact social et environnemental. Pour ce faire, écrivent-ils, elle s’associe à l’élimination de l’agriculture comme stratégie prioritaire de création de besoins.’’

« Elle revendique les terres les plus fertiles des agriculteurs qui lui sont voisins. Paradoxalement, sous la baguette du Ministre de l’Agriculture de votre pays, M. Limber Cruz, et en violation des lois haïtiennes, de nouvelles terres ont été arpentées illégalement en faveur de la CODEVI. Comme toujours, la CODEVI veut se servir de l’État haïtien comme bouclier », déclarent les paysans.

Ils ajoutent que ‘‘la CODEVI alimente des bandes armées à Ouanaminthe et fournit des munitions à des bandits notoires. Par l’entremise de ses employés, des hommes armés, activement recherchés par la Police Nationale d’Haïti, sont régulièrement payés par la CODEVI’’

Ils informent également que plusieurs plaintes ont été portées contre la CODEVI, la Banque Mondiale et l’État Haïtien pour des faits délictueux divers notamment la plainte devant la Banque Mondiale/CAO (le traitement du dossier est en cours) ; la plainte devant la Commission Interaméricaine des Droits de l’Homme/OEA (le dossier est en cours de traitement) ; une plainte au Cabinet d’instruction contre Fernando Cappellan, Limber Cruz impliqués dans des crimes en Haïti. ‘‘Certaines décisions judiciaires ont été déjà rendues contre la CODEVI’’, ont-ils fait savoir.

En ce qui a trait à la construction du mur dominicain à la frontière, ils notent que des dérives révoltantes sont constatées dans l’exécution du projet de construction dudit mur.

Selon eux, les limites des frontières ne sont pas respectées. L’intégrité du territoire haïtien est violée. Un canal devant relier les eaux de la rivière Massacre aux terres agricoles est saboté par des agriculteurs dominicains, ajoutant que des soldats dominicains foulent le sol haïtien et menacent de mort les Haïtiens.

Les paysans affirment’’ qu’à l’instar des bandes armées à Port-au-Prince, le service de sécurité de la CODEVI est constitué d’un corps illégal, détenant illégalement des armes à feu. Les armes de guerre, qu’utilisent les agents attachés à la sécurité de la CODEVI, ne sont pas autorisées sur le sol haïtien au profit d’une entreprise commerciale privée.’’

« Votre Gouvernement, aurait-il autorisé le transport et le passage des armes de guerre vers Haïti ?  Combien ? A quelle fréquence ? En outre, le chef de sécurité de la CODEVI, le sieur Tejada ainsi connu, dominicain, est condamné par la justice hattienne pour des infractions commises en Haïti. Mais, il jouit de la protection de votre Gouvernent.  Les paysans croient que, dès la réception de cette correspondance, le sieur Tejada sera livrée à la justice haïtienne, déclarent-ils.