Sanint Domingue, mercredi 23 octobre 2024 – Sept organisations de défense des droits humains, féministes, antiracistes et de gauche ont adressé une lettre à la procureure générale, Miriam Germán, en exhortant l’institution sous sa direction à informer la société dominicaine sur les actions prises pour enquêter et poursuivre en justice les responsables des violations systématiques des droits humains des personnes noires.
Les entités estiment que les garanties constitutionnelles et la légalité nationale et internationale ont été affectées, dans le cadre de ce qu’elles ont qualifié de « politique migratoire ouvertement discriminatoire ». Elles ont demandé des informations sur les poursuites engagées contre les responsables de crimes de haine raciale.
Les organisations expliquent dans le document déposé auprès du Bureau du Procureur général de la République (PGR) que la situation des droits humains de la communauté immigrée haïtienne, des Dominicains d’origine haïtienne et des secteurs socio-économiquement vulnérables de la population noire dominicaine s’est aggravée dans le pays au cours des deux dernières années, après la réunion tenue par plusieurs des organisations signataires avec les plus hautes autorités du PGR, le 2 décembre 2022.
« La situation actuelle constitue un véritable état d’exception promu par le pouvoir exécutif, dans lequel l’application des garanties constitutionnelles qui protègent les citoyens contre les arrestations arbitraires, les perquisitions illégales, la discrimination et la violence de l’État a été de facto suspendue », ont-ils fait constater.
« La Convention américaine relative aux droits de l’homme, dont l’État dominicain est signataire, interdit explicitement dans son article 22 les expulsions massives, sommaires ou collectives, car elles portent atteinte au droit de protection personnelle qui s’applique à toute personne, quelle que soit son origine nationale. La loi générale sur l’immigration 285-04 ordonne le respect de la procédure légale lors des arrestations migratoires. Le Règlement 631-11 d’application de la loi 285-04, dans son article 134-alinéa, établit que la détention migratoire doit être le dernier recours utilisé par les autorités migratoires « lorsque les autres moyens réglementaires sont jugés insuffisants », mais l’exécution de détentions migratoires massives depuis trois ans contredit ce principe », ont-ils expliqué.
« En pratique, il existe une suspension des droits constitutionnels consacrés dans les articles 37, 38 et 39, relatifs au droit à la vie, à la dignité humaine et à l’égalité, ainsi que des droits liés à la liberté et à la sécurité personnelles, à l’intégrité personnelle, à la vie privée et à l’honneur personnel, et à la liberté de circulation, consignés dans les articles 40, 42, 44, 46 respectivement », ont-ils dénoncé, ajoutant que la détention de mineurs viole l’article 56 de la Constitution, qui ordonne que la famille, la société et l’État fassent primer l’intérêt supérieur de l’enfant et de l’adolescent, ainsi que la propre Loi sur l’immigration.
« Il est de notoriété publique que tant les agents de la DGM que les forces de police et militaires se couvrent le visage avec des cagoules et ne portent pas d’identification visible. Cette pratique institutionnelle illégale facilite et favorise la commission de délits tels que des vols, des arrestations arbitraires à des fins d’extorsion, des tortures, des assassinats et des viols », ont-ils ajouté.
Concernant l’expulsion de personnes dominicaines d’origine haïtienne, ils estiment que « la Constitution interdit, dans son article 46, l’expulsion de personnes dominicaines du territoire national, sauf dans le cadre de processus d’extradition », raison pour laquelle ils exigent que des mesures soient prises pour empêcher la poursuite des arrestations arbitraires et des expulsions de personnes dominicaines.
Les organisations demandent des informations sur les poursuites engagées contre les personnes impliquées dans de nombreux lynchages racistes, assassinats, exécutions lors de procédures d’interdiction migratoire, menaces de mort perpétrées par des organisations d’extrême droite, arrestations arbitraires et perquisitions sans mandat judiciaire, profilage racial, arrestations illégales de femmes enceintes, de nourrissons et de personnes âgées, ainsi que d’autres délits commis dans le cadre des processus d’interdiction migratoire.
Ils demandent également des informations sur les poursuites contre les personnes impliquées dans l’attaque contre le siège de l’organisation Mosctha en octobre de cette année par des extrémistes de droite et dans l’arrestation arbitraire du dirigeant du Mouvement Reconocido, Franklin Dinol.
Concernant les événements du 17 octobre au centre de détention migratoire de Haina, au cours desquels, selon des rapports de presse et d’activistes des droits humains, une forte répression a eu lieu lors d’une manifestation de personnes détenues, ils demandent également des informations sur l’existence d’une enquête.
Les organisations signataires de la lettre sont le Collectif #HaitianosRD, le Mouvement Reconocido, le Mouvement des Femmes Dominicaines-Haïtiennes, Heartland Alliance International, le Mouvement Socialiste des Travailleurs et Travailleuses, Mosctha et le Collectif Junta de Prietas.
Source: Noticias SIN