PORT-AU-PRINCE, vendredi 7 juillet 2023– Dans un rapport d’enquête transmis au parquet de Port-au-Prince, le bureau des affaires financières et économiques (BAFE), une unité de la police judiciaire, a recommandé des poursuites judiciaires à l’encontre de plusieurs employés et cadres de la banque commerciale Sogebank.
Les personnes concernées par cette action judiciaire sont : Catheline Barochin, Daphkar St Paul et Leevens Lifete Déjoie.
‘‘ Cependant, s’agissant du nommé Leevens Lifète Déjoie, le BAFE a souhaité qu’il soit purement et simplement relâché, vu qu’à ce stade, l’enquête n’a pas révélé l’évidence de sa participation dans ces actes malhonnêtes’’, selon le rapport.
Le document a également recommandé que la justice continue à rechercher à partir de démarches diplomatiques et via INTERPOL, les nommés Anne Kettia Georges, Jean Ralph Antoine, Jean Junior Memnon et Stéphane Joseph, pour qu’ils répondent de leurs actes.
Ces individus sont accusés de vol, de complicité de vol, d’abus de confiance, de faux et usage de faux, d’obstruction à la justice et d’association de malfaiteurs.
‘‘Ils seraient impliqués, selon le rapport du BAFE, dans le détournement de plus de 132 mille dollars américains en abusant de la confiance des propriétaires de l’entreprise Sonia Produits Alimentaires.’’
Le rapport a précisé que, ‘‘l’enquête diligentée dans le cadre de cette affaire a permis de confirmer sans ambages que l’entreprise « Sonia Produits Alimentaires » a été victime des actes d’ Abus de confiance, de Vol, de Complicité de vol, de Faux et d’ Usage de faux et d’ Association de malfaiteurs, impliquant directement la SOGEBANK, ses employés et consorts. Anne Kettia Georges, un des éléments clés de cette enquête, a bénéficié non seulement du support ou de la complicité de ses supérieurs hiérarchiques, mais aussi de la faiblesse du système de contrôle de ladite institution.’’
« Ces malversations graves révélées par cette enquête constituent une menace grave, à la fois pour la sécurité de l’argent des déposants et du système financier en général, qui, si elle n’est réprimée ou maitrisée, risque d’avoir des répercussions désastreuses sur le fonctionnement de l’économie nationale, car c’est la confiance indispensable des clients qui est mise en cause », déclarent les enquêteurs du BAFE.
D’ailleurs, le législateur, à travers la loi du 14 mai 2012 portant sur les banques et autres institutions financières, dispose clairement : « Il importe à l’Etat Haïtien de veiller au bon fonctionnement du système financier ».
Dans leur requête au commissaire du gouvernement, ils ont souhaité que, ‘‘tant pour le triomphe de la justice que pour la protection du système financier, que l’action publique soit mise en mouvement contre tous les individus indexés dans ce dossier afin de dissuader les autres banques et leurs employés, d’une éventuelle prolifération de ce spectacle hideux offert par la Sogebank et certains de ses employés et consorts.’’
Selon le rapport, ‘‘que ce soient les plaignants, que ce soit la Sogebank, ils ont tous et clairement indexé la responsabilité de la nommé Anne Ketia Georges dans cette vaste affaire de détournements de fonds. Ces accusations ont été démontrées et supportées par les révélations de I ‘ enquête. Il faut considérer par exemple, le fait que la quasi-totalité du montant des cinq millions huit cent mille gourdes (5, 800. 000. 00 HTG) figurée dans la plainte des victimes et pas mal d’autres, ont été débités et détournés par la nommée Anne Ketia Georges avec la complicité d’autres dirigeants influents de la succursale. Ceci, sans l’autorisation des propriétaires du compte, simulant de régler des comptes fournisseurs de « Sonia Produits Alimentaires » qui, en réalité n’ont été effectués qu’à partir de chèques sans provisions. Des faits qui constituent des actes de vols avérés, d’abus de confiance et d’association de malfaiteurs.’’
Les enquêteurs ont noté que ‘‘tous les cadres de la banque entendus dans le cadre de ce dossier ont tenté d’une manière ou d’une autre d’accuser la nommée Anne Kettia GEORGES comme étant le responsable des forfaits, confirmant ainsi qu’ils étaient au courant des actes malhonnêtes de leur collègue, alors qu’ils n’ont rien fait pour la freiner dans ses déviances. D’ailleurs, c’est la nommée Anne Kétia GEORGES qui a, délibérément, choisi de rompre ses relations avec la Sogebank par abandon de poste.’’
‘‘En dépit du fait que tous les cadres entendus ont voulu culpabiliser Anne Ketia Georges, la nommée Catheline Barochin, en tant que directrice adjointe à la succursale concernée, n’était pas en mesure de préciser aux investigateurs les suivis légaux que la banque aurait engagés contre la mise en cause pour les préjudices causés aux clients ou même à la Sogebank’’, selon le rapport.
‘‘Qui pis est, lit-on dans le document, la nommée Caheline Barochin avait confié lors de son audition que la banque avait enregistré plusieurs plaintes contre l’employée Anne Kethia Georges et dédommagé, par le passé, des clients pour des cas similaires.’’
S’agissant des déclarations de la nommée Daphkar St Paul, lors de son audition, elle aussi avait avoué que ladite banque a déjà remboursé plusieurs de ses clients en raison de cas pareils impliquant la nommée Anne Ketia Georges. Ce qui laisse comprendre qu’Anne Ketia Georges, malgré ses actes à répétition, a toujours bénéficié du silence complice de ses patrons. L’un des cas ayant été le plus médiatisé, notamment sur les réseaux sociaux, réfère à celui de I’artiste-chanteur Roody RoodBoy, au point que la banque a été obligée de rembourser au chanteur les fonds détournés, ont souligné les enqueteurs.
Selon le rapport, ‘‘La responsabilité de ces deux cadres de la Sogebank intervient du fait qu’elles ont été en général, celles qui autorisent les transactions malsaines, commanditées par Anne Ketia GEORGES, alors qu’elles étaient au courant de toutes les malversations de leur collègue. De par leur fonction, elles avaient pour mission de veiller à la régularité des opérations avant de les valider. En approuvant les transactions manigancées par Anne Kettia Georges, elles se font complices de cette dernière, en l’ aidant consciemment réaliser ses actes malhonnêtes.’’
Le rapport du BAFE a indiqué que, beaucoup d’opérations qui, normalement n’auraient pas dû être approuvées, l’ont été malgré tout. Parfois, elles s’ arrogent même de se trouver des arguments pour justifier leur participation dans la dilapidation des fonds de clients de la Sogebank. La quasi-totalité des transactions relatives aux fournisseurs de « Sonia Produits Alimentaires », à la base de cette affaire a été autorisée par les susnommées. Par exemples, Les transactions relatives au chèque # 0794, de montant treize mille neuf cent dollars américains (13,900.00 USD) et le retrait de deux millions trois cent cinquante-quatre mille deux cents et 0% gourdes (2,354,200.00 HT G) ont quand même été autorisées par ces dernières, malgré l’évidence d’incompatibilité des montants en chiffres et en lettres.
‘‘Il y a lieu aussi de signaler le cas de la transaction réalisée le 1 er avril 2022 relative au chèque # 154, de montant d’un million quatre cent quatre-vingt-deux mille gourdes et 00% (1, 482,000.00 HTG) où il est mentionné à l’endos : la dame Lagrenade, sur place, lequel montant aurait été encaissé Joseph DIRANIER ou DURANIER, qui, au même titre que la dame Sonia Lagrenade, ont contesté cette transaction- Comble de tout cela,poursuit le document, la nommée Anne Kettia Georges a abandonné son poste de travail avec l’aide de sa collègue Catheline Barochin, méprisant la présence des victimes sur le site de la succursale de la rue Darguin, alors qu’elles voulaient se plaindre contre la nommée.’’
En ce qui a trait au nommé Jean Junior Memnon, responsable de la Section Audit Interne, le niveau de prudence de ce dernier l’a rendu très contradictoire dans ses déclarations. Il n’a pas voulu parler du compte libellé en gourde concerné par l’enquête en cours. Il a été de préférence très abondant à parler de l’autre compte libellé en dollar qu’il a identifié comme étant à découvert bancaire.
Selon les enquêteurs, d’abord, il a déclaré que lors de ses travaux d’audit n’avoir pas consulté le compte en gourde de Sonia Produits Alimentaires », puisque les réclamations concernent des montants en devise américaine, alors qu’il était bien imbu du dossier, de la manière dont tout a été orchestré à partir du compte en gourde ci-devant mentionné.
Ensuite, il s’est contredit en relatant un peu plus loin, avoir consulté le compte en gourde et que celui-ci n’était pas à découvert, au contraire les transactions étaient passées normalement. Ceci, sans ajouter le moindre détail.’’
Les enquêteurs ont souligné que depuis cette séance d’audition qui a été dans l’ensemble peu convaincante, le susnommé a pris toutes les dispositions pour s’éloigner du reste de la procédure, boudant jusqu’à date la nouvelle invitation qui lui a été adressée. Une attitude qui témoigne clairement d’un aveu de responsabilité, sachant consciemment qu’il n’allait pas pouvoir sortir de cette affaire, en tant que responsable d’un service d audit interne défaillant, du moins, complice des actes de détournements de fonds des déposants, en s’abstenant de faire des recommandations avisées pour arrêter cette hémorragie chronique de dilapidation de comptes des clients, alors qu’il en était bien informé.
Quant à Jean Ralph Antoine, il est celui qui était directeur de la succursale Sogebank de la rue Darguin, et avait la responsabilité première de veiller au bon fonctionnement de ladite succursale en la préservant de tout acte de fraude et de risque d’infraction, selon les enquêteurs. ‘‘Au lieu de cela, lit-on dans le rapport, il a fait preuve d’une tolérance complice à l’égard de ses collaborateurs malgré le fait qu’il a été au courant que sa succursale était devenue le théâtre d’actes à répétition de vols de fonds des comptes clients.’’
Selon les enquêteurs, ‘‘dans leurs différentes auditions, les nommées Daphkar St Paul et Cathelinne Barochin I ‘ ont clairement exprimé : « que la Sogebank a déjà consenti des remboursements à des clients pour des cas similaires, suite à des plaintes reçues ». Pourtant, aucune disposition drastique, du moins significative, n’a été prise pour démanteler ce réseau mafieux fonctionnant au sein de la banque, ont précisé les enquêteurs.
De plus, ont souligné les enquêteurs, au lieu d’ identifier et de sévir contre ce réseau mafieux, la SOGEBANK s’est juste contenté d’indexer la nommée Anne Kettia Georges et de rembourser les clients victimes pour étouffer les faits, alors que, tout laisse croire que la nommée Anne Ketia Georges, simple Agent administratif, qui n’a aucune responsabilité dans la gestion du système informatique de la Sogebank et qui n’est pas caissière non plus, ne saurait défier tout un système sans la complicité de hauts cadres de ladite succursale dont son directeur passif, le nommé Jean Ralph Antoine.
Ils ont mentionné que depuis sa dernière audition au BAFE, tout comme son collègue le nommé Jean Junior MEMNON, le susdit directeur s’est arrangé pour se soustraire des suites de la procédure, ne répondant plus aux invitations, ne se présentant plus à son poste de travail. Au contraire, il a même changé d’adresse, selon le rapport.