Montréal, vendredi 4 mars 2022- Michaëlle Jean ne marche pas ses mots pour décrit le chaos qui sevit en Haïti où la criminalité et la violence des gangs armés rythment le quotidien des citoyens, dans l’indifférence totale des autorités.
Ancienne gouverneure générale du Canada et membre du comité directeur de Think Tank Haïti, un projet conjoint du Dialogue Interaméricain et de l’Université Quisqueya, Mme Jean estime que, « La légitimité d’Ariel Henry est sérieusement mise à mal aux yeux du peuple haïtien.
Elle souligne que Dr. Ariel Henry a été nommé Premier ministre par le président Jovenel Moïse qui, voulant gouverner par décret, a démantelé toutes les institutions garantissant l’État de droit, fait éclater l’Assemblée nationale et empêché des élections législatives.
‘‘Le clan politique auquel Henry est associé a été fortement impliqué dans le scandale Petrocaribe, l’affaire de corruption la plus grave qu’Haïti ait connu au cours des dernières décennies. Le régime dont il est issu autorise une totale impunité pour les forces mafieuses qui ont pillé, ruiné et livré le pays au banditisme et à l’insécurité, selon l’ex-gouverneure générale du Canada.’’
S’exprimant dans le cadre d’un document aide-mémoire du bureau de suivi de l’accord de Montana (BSA) adressé a la CARICOM qui a tenu cette semaine sa 33e réunion inter-sessionnelle de la conférence des chefs de gouvernement à Belize, l’ancienne présentatrice de radio Canada indique que l’influence des gangs est réelle dans tout le pays, et elle fait peser un risque sérieux lors des élections.
Elle rappelle que Jovenel Moïse a été assassiné le jour où Henry était censé prendre ses fonctions de Premier ministre en juillet dernier. ‘‘En raison d’un manque de dispositions constitutionnelles et d’une formule démocratique pour combler cette vacance présidentielle, un « noyau » d’ambassadeurs, sous la direction des États-Unis, des Nations Unies, de la France et du Canada, a choisi Henry comme chef du gouvernement, soutient Mme Jean.
‘‘Pour le peuple haïtien, souligne l’ancienne secrétaire générale de l’organisation de la francophonie (OIF), c’est un délit d’ingérence. Et maintenant, la communauté internationale clame que la solution à la crise doit venir des Haïtiens.’’
La communauté internationale, poursuit-elle, n’a pas non plus pleinement reconnu la “Commission pour une solution haïtienne”, qui depuis juillet, face à l’extrême urgence, a rassemblé les forces citoyennes et conclu l’accord de Montana en faveur d’un gouvernement de transition et d’un gouvernement intérimaire de deux ans-gouvernement, qui assurerait le retour à l’ordre constitutionnel et l’organisation d’élections démocratiques, selon Mme Jean.
Michaëlle Jean souligne également que lors de la conférence du 22 janvier organisée par le gouvernement canadien et à laquelle participaient les ministres des Affaires étrangères de 20 pays, Dr. Henry a reçu des instructions fermes pour lancer un processus électoral et établir un pacte avec la société civile. Les signataires de l’Accord de Montana, auquel plusieurs partis politiques ont adhéré, n’ont pas été invités.
‘‘Si la solution doit venir des Haïtiens, alors c’est à eux de choisir et de décider, déclare Michaëlle Jean.