Des citoyens haïtiens interpellent la Cour Supérieure des Comptes sur la gestion controversée du Fonds de Gestion et de Développement des Collectivités Territoriales…

COUR DES COMPTES ET DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF (CSCCA)

PORT-AU-PRINCE, samedi 9 novembre 2024, des citoyens haïtiens adressent une requête formelle à la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSCCA), attirant l’attention sur une série d’irrégularités et de violations dans la gestion du Fonds de Gestion et de Développement des Collectivités Territoriales (FGDCT). Ce fonds, créé par la loi du 20 août 1996, vise principalement à soutenir les collectivités territoriales en leur assurant des ressources pour les salaires de leur personnel, les indemnités des élus locaux, et pour les besoins de fonctionnement de leurs administrations.

Cependant, les signataires de cette requête dénoncent que les fonds destinés aux collectivités n’ont pas été utilisés conformément aux dispositions légales. Ils évoquent notamment des décisions gouvernementales, de l’époque du feu président Jovenel Moïse et de l’ex-Premier ministre de facto Ariel Henry, qui auraient suspendu les subventions versées aux communes pour une période cumulée de près de trois ans. Cette suspension aurait privé de nombreuses familles de revenus essentiels, aggravant la précarité économique des employés et élus locaux. En outre, des allégations préoccupantes font état de détournements des ressources de ce fonds au profit de gangs armés sévissant dans le pays. Les signataires soulignent ici que, selon des informations des autorités américaines, ces détournements auraient contribué à renforcer la puissance de feu des gangs, alimentant une insécurité déjà préoccupante en Haïti.

Par ailleurs, le document dénonce plusieurs pratiques de corruption ayant marqué la gestion du FGDCT : des pots-de-vin ou commissions réclamés aux collectivités locales pour accéder à leurs propres ressources, des détournements de fonds destinés aux assemblées des sections communales, ou encore l’octroi d’allocations non budgétisées à certains maires ou coordonnateurs, favorisant ainsi une gestion opaque et informelle. L’impact de ces malversations dépasse largement le cadre administratif : les signataires font valoir que le manque de financement des communes a contribué à une détérioration des conditions de vie, notamment en matière d’hygiène publique et de services de santé, facilitant ainsi la propagation de maladies.

Le secteur agricole, essentiel pour l’économie et la sécurité alimentaire du pays, n’est pas non plus épargné : les fonds qui auraient pu être alloués à des projets agricoles ou d’élevage sont détournés, privant ainsi les paysans de ressources indispensables pour le développement de leurs activités. Les citoyens dénoncent également la dépendance accrue des mairies envers les financements externes ou informels, et la pression exercée sur certains élus pour les contraindre à coopérer dans un système corrompu.

Les citoyens requièrent de la CSCCA plusieurs actions immédiates pour redresser la situation. Ils demandent que le décret de finances 2024-2025 soit révisé pour inclure des prévisions de revenus du FGDCT, et que les allocations destinées aux collectivités territoriales soient clairement établies. Ils appellent également à une estimation précise et documentée des recettes récentes du fonds, vérifiées par la Direction Générale des Impôts (DGI) et la Banque de la République d’Haïti (BRH). En outre, les signataires insistent pour que la répartition des charges financées par le fonds soit assurée de manière transparente et proportionnée entre les différentes entités locales.