République dominicaine, vendredi 11 octobre 2024 – Une lettre ouverte, signée par plusieurs centaines d’intellectuels, chercheurs, artistes et personnalités de la société civile provenant de divers pays, a été publiée pour dénoncer la politique migratoire du gouvernement dominicain. Le document critique sévèrement la décision du président Luis Abinader de déporter massivement des Haïtiens et des Dominicains d’origine haïtienne, une mesure qualifiée de « violente » et « inhumaine » par les signataires.
La lettre, adressée directement au président Abinader, fait référence à une annonce faite le 2 octobre par le gouvernement dominicain, qui prévoit la déportation hebdomadaire de 10 000 Haïtiens. Selon les auteurs de la lettre, ce choix de date n’est pas anodin, car il coïncide avec le 87e anniversaire du tristement célèbre « massacre du Persil », où plus de 20 000 Haïtiens et Dominicains noirs ont été massacrés sous les ordres du dictateur Rafael Trujillo en 1937.
Les signataires accusent le gouvernement dominicain de poursuivre une politique de nettoyage ethnique, s’appuyant sur des idéologies extrémistes et exploitant la peur et la haine à des fins politiques. « Le moment de votre annonce n’est pas une simple coïncidence », lit-on dans la lettre, « mais un acte intentionnel pour montrer que l’État dominicain poursuit le plan du dictateur de nettoyage ethnique du peuple haïtien sur le sol dominicain. »
La lettre appelle à une suspension immédiate des déportations massives et demande la restauration de la nationalité aux personnes dénationalisées en 2013, à la suite d’une décision controversée de la Cour constitutionnelle dominicaine. Elle réclame également la fin de l’état d’exception de facto, qui, selon les signataires, porte atteinte aux libertés civiles fondamentales et constitue une menace pour la démocratie dans le pays.
En outre, la lettre dénonce les conditions de travail forcé imposées aux travailleurs haïtiens en République dominicaine et exhorte le gouvernement à respecter leurs droits humains. Les signataires qualifient cette politique de « macabre » et soulignent son caractère inhumain, notamment en mentionnant les cas de femmes enceintes ciblées par les autorités pour être déportées.
La lettre met également en lumière la crise politique et humanitaire sans précédent qui sévit actuellement en Haïti, un contexte qui rend les décisions du gouvernement dominicain d’autant plus cruelles. « À un moment où le voisin Haïti se confronte à l’une de ses pires crises politiques et catastrophes humanitaires, vous avez choisi de le rendre encore plus vulnérable et de promouvoir la haine et le chaos », affirme le collectif.
Parmi les signataires, figurent des voix influentes du monde académique, artistique et militant, issues de plusieurs pays. Ils appellent la communauté internationale à prendre position contre les actions du gouvernement dominicain et à exiger le respect des droits de l’homme.
Le collectif critique également les alliances géopolitiques douteuses de la République dominicaine, qui s’est rapprochée d’Israël et de l’ancien président américain Donald Trump, tout en restant dépendante des puissances étrangères et des grandes entreprises extractives. Selon les signataires, cette dépendance est hypocritement attribuée aux migrants haïtiens, dont la contribution économique est pourtant cruciale pour le pays.
La lettre conclut en rappelant que les politiques du président Abinader constituent une menace grave pour la démocratie et les droits humains en République dominicaine. Les signataires espèrent que cette prise de position collective incitera les autorités à reconsidérer leur plan et à mettre fin à ce qu’ils appellent « la haine parrainée par l’État ».
Cette lettre est publiée dans son intégralité sur le site web de MST-RD. Pour ajouter votre signature, veuillez remplir le formulaire suivant : https://forms.gle/wPfbAY3R7CJZFxgs7