PORT-AU-PRINCE, lundi 10 avril 2023– Le réseau national de défense des droits humains (RNDDH) souligne, dans un rapport, que de novembre 2022 à janvier 2023, 13 des 18 juridictions de première instance du pays ont organisé des audiences correctionnelles et criminelles.
Selon le document du RNDDH, des 154 cas qui ont été fixés – dont 149 sans assistance de jury et 5 avec assistance de jury – 104 ont été entendus et 50 ont été renvoyés.
‘‘Parmi les 200 personnes qui auraient dû être jugées lors de ces audiences criminelles, 128 ont effectivement été jugées. Cinquante-trois (53) ont été libérées et 75 autres ont été condamnées. Le sort de 72 parmi les accusés-es n’a pas été fixé soit parce que le verdict n’a pas été prononcé séance tenante, soit parce que leurs dossiers ont été renvoyés par les tribunaux criminels’’, soutient le rapport.
L’organisation souligne que ‘‘ceux et celles qui ont été jugés mais dont le verdict n’a pas encore été prononcé, finiront par connaître, avec les interventions assidues de leurs avocats, les décisions prises par les magistrats qui ont présidé les Tribunaux criminels lors de leur jugement. Les autres dont les dossiers ont été purement renvoyés sine die, risquent de passer des mois, voire plusieurs années en prison, avant de comparaitre une autre fois, par devant le tribunal criminel.’’
Selon des remarques sur la réalisation des audiences criminelles produites par le RNDDH, les dossiers ont été renvoyés en raison de l’absence, aux jours des audiences, des représentants du ministère public ou de toute autre partie impliquée dans les dossiers ; de nombreux individus non identifiés ont été renvoyés par les juges d’instruction, par devant le Tribunal criminel pour être jugés.
L’organisation note aussi qu’il y a souvent une absence de coordination dans les décisions prises par les autorités judiciaires d’une même juridiction et le cas de viols ainsi que les cas d’enlèvement suivis de séquestration contre rançon sont banalisés dans certaines juridictions.
Le RNDDH et ses structures régionales estiment positif le fait par différents chefs de juridiction d’avoir décidé de réaliser ces audiences car, ce faisant, ils prouvent que la détention préventive illégale et arbitraire, dont le taux est deux (2) fois plus élevées en Haïti que dans la région des Amériques, ainsi que les conditions inhumaines de détention des personnes privées de liberté, ne les laissent pas indifférents.
Cependant que puisque plus de neuf mille (9.000) personnes sont en attente de jugement, organiser des audiences criminelles pour un peu plus d’une centaine d’entre elles ne peut aucunement aider à résoudre le drame que représente la détention préventive illégale et arbitraire.
‘‘Le fait de juger moins de 3 % de la population carcérale en attente de jugement n’impacte pas le statut juridique des détenus-es. A ce rythme, la situation ne sera jamais normalisée dans les différentes prisons du pays où la détention préventive est devenue la règle. Pour preuve, l’organisation de ces audiences correctionnelles et criminelles n’ont impacté le taux de détention préventive que de 1.3 %’’, soutient le RNDDH.
Le RNDDH et ses structures régionales déclarent regretter que les remarques sur le déroulement des audiences criminelles soient similaires à celles produites au cours des années antérieures : Affaires renvoyées pour des raisons diverses dont plusieurs sont inadmissibles, absence des accusés-es, absence de partie civile, prise de siège tardive et renvoi du tribunal en milieu de journée, banalisation des cas de viols et d’enlèvements suivis
Le RNDDH et ses structures régionales, recommandent aux autorités judiciaires de donner suite aux recommandations du CSPJ, relatives aux magistrats-tes écartés du système judiciaire haïtien ; d’organiser régulièrement des audiences correctionnelles et criminelles et planifier de juger au moins 50 % des personnes en attente de jugement, au cours de l’année judiciaire 2022-2023.
Le RNDDH recommande également aux autorités de prioriser lors des audiences correctionnelles et criminelles, les détenus-es déjà en situation de détention préventive illégale et arbitraire et de donner suite aux engagements contractés en 2017 dans l’accord liant l’Etat haïtien aux greffiers, pour une amélioration de leurs conditions générales de travail.
Cliquez sur le lien suivant pour lire le rapport complet du RNDDH:
Rap Justice – Assises – 2022-2023 – VP – 042023