De multiples anomalies émaillent la gestion faite par le gouvernement de la pandémie de Covid-19, selon un rapport d’audit de la Cour des Comptes…

Ministere de la Sante Publique et de la Population (MSPP)/image d'illustration...

PORT-AU-PRINCE, mardi 14 juin 2022– Dans sa conclusion générale, la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSCCA) estime que ‘‘la réponse gouvernementale, mise en œuvre dans le cadre de la gestion de la crise sanitaire provoquée par la pandémie de Covid-19, a certainement fonctionné dans plusieurs domaines ou dans différents endroits à travers le pays.’’

Cependant, le rapport d’audit souligne que, ‘‘les limitations qui sont évoquées dans le présent rapport n’ont pas permis à la Cour d’exprimer une opinion sur les réalisations faites par les entités mobilisées au niveau du Gouvernement.’’

Dans le cadre de la réponse gouvernementale a la pandémie de Covid-19, plus de 9.2 milliards de gourdes (9 225 397 757.48) ont été alloués aux différentes entités impliquées dans la lutte contre le virus.

Selon le ministère de l’économie et des finances (MEF), le gouvernement a effectué des dépenses de l’ordre de 8 161 470 464.31 gourdes, à travers le MSPP, MTPTC, MENFP, le MDE, FAES, la PNH et le SNGRS.

L’audit de la CSCCA note que seulement des dépenses totalisant un montant de 6 027 183 060.34 gourdes ont été justifiées. La Cour relève que les dépenses du gouvernement accusent un écart de plus de 2.1 milliards (2 134 287 403.97) gourdes.

Selon le rapport de la CSCCA, ‘‘cet écart traduit le montant total des dépenses considérées comme non justifiées, vues antérieurement comme l’une des principales anomalies constatées dans l’exécution des dépenses. Le principe est que toutes les dépenses publiques doivent être justifiées et appuyées des pièces justificatives.’’

En plus des problèmes reliés à la traçabilité des dépenses, la Cour affirme avoir constaté que ‘‘la liste des pièces justificatives à joindre obligatoirement au mandat de dépense n’était pas une fonctionnalité bien établie.’’

La Cour dit avoir constaté que le ministère de l’intérieur et des collectivités territoriales (MICT) avait pris, à l’instar des entités mobilisées auxquelles des fonds avaient été alloués tel indiqué dans le rapport du MEF, des engagements importants pendant la période d’avril à novembre 2020.

« Il est apparu que le MEF n’a pas communiqué toute l’information dont il avait connaissance au regard des requêtes de décaissement produites par le MICT. Portant sur un montant évalué à plus de 105 millions de gourdes, les premiers engagements étaient de nature à avoir une incidence significative sur la situation financière de la Réponse Gouvernementale », lit-on dans le rapport d’audit de la CSCCA.

La Cour souligne qu’après que le Gouvernement ait pris deux nouveaux arrêtés pour déclarer et renouveler l’état d’urgence sanitaire pour huit et 15 jours respectivement les 22 et 31 mai 2021, le MICT avait conclu rapidement avec le même fournisseur deux nouveaux contrats pour un montant total de $US 7 000,000.00.

‘‘Dans les deux nouveaux arrêtés, il n’est pas indiqué que le MICT avait une responsabilité particulière l’obligeant à intervenir ou à passer des marchés en urgence’’, selon la Cour.

La Cour a conclu, dans ses considérations d’ordre général, que ‘‘l’absence de rapports produits sur la gestion des projets, mis en œuvre par les différentes entités gouvernementales mobilisées dans le cadre de la lutte contre la pandémie de Covid-19, constituait un problème majeur ouvrant sur l’écart de responsabilité.    Sur la base de cette considération, elle n’a pas pu émettre une opinion sur la performance de la gestion gouvernementale.’’

Elle n’avoir pas pu vérifier de manière étendue, tant sur le plan du financement que celui de la dépense ou des réalisations qui devraient en résulter, toutes les transactions relatives à la gestion de la pandémie de Covid-19 par le Gouvernement.

‘‘Cependant, précise le rapport, en ce qui a trait à la régularité formelle des dépenses examinées ou circonscrites dans le champ de l’audit, les dispositifs de contrôle interne ont pleinement démontré, sauf pour les transactions entachées des anomalies signalées, leur efficacité dans les conditions de mise en œuvre actuelles.’’

D’une manière générale, poursuit le document, les problèmes que la Cour a observés en exploitant la documentation disponible ont été relatés.  Ils concernent la gestion de la Réponse Gouvernementale dans son ensemble.

« En tout état de cause, ils peuvent être attribués à un manque de préparation, de coordination ou de planification, ce qui porterait à dénoncer des problèmes de gestion complexes ou d’organisation, qui ne sont pas réglés à mesure qu’ils surviennent pour responsabiliser les ministères et organismes publics, et améliorer la qualité des services qu’ils sont appelés à fournir à la population », ajoute la Cour.

Selon la Cour, ‘‘il ressort de ces considérations que la pandémie de Covid-19, dont le pays a été, dans une certaine mesure, épargné jusque-là des multiples dangers, constitue une opportunité en ce sens qu’elle a mis à l’épreuve les capacités réelles du pays à faire face à des urgences sur le plan sanitaire et économique en même temps.’’

« Dans le contexte de la vulnérabilité générale du pays, il est important de retenir que des situations comme cette pandémie, qui a fait des dégâts considérables dans de nombreux pays, peuvent se produire à tout moment », souligne la Cour.

‘‘À ce sujet, les inquiétudes sont nombreuses, et le Gouvernement serait vraiment proactif, si déjà, il était en ordre de marche dans des efforts en vue de l’élargissement de l’assiette du Fonds d’urgence, et du renforcement des capacités administratives mais aussi d’intervention des institutions comme le MAST, le MICT, le MSPP, le MTPTC, le MENFP ou le MDE’’, selon le rapport.

La Cour continuera de préconiser la transparence et la reddition des comptes.  « Mais il faut mettre en place parallèlement les mécanismes d’imputabilité des gestionnaires publics quant à leur façon de dépenser les fonds publics, d’assurer les prestations de services publics et de gérer les projets ou programmes gouvernementaux », conclut le rapport de la CSCCA.