Un rapport alarmant des Nations unies expose une escalade sans précédent de la violence et des atteintes aux droits de l’homme en Haïti, dépeignant un tableau sombre de l’insécurité et du désespoir qui sévissent dans le pays.
PORT-AU-PRINCE, vendredi 5 avril 2024– Dans un rapport alarmant publié par l’Organisation des Nations unies, la situation des droits de l’homme en Haïti est exposée de manière brutale, révélant une crise humanitaire en évolution constante. Les données fournies mettent en lumière une escalade dramatique de la violence des gangs et des violations flagrantes des droits fondamentaux, mettant en péril la vie de milliers de personnes à travers le pays.
Le rapport souligne que l’insécurité généralisée continue d’entraver la liberté de mouvement et de faire obstacle à l’accès à l’aide humanitaire, ainsi qu’aux biens et services essentiels tels que la nourriture, l’eau, les soins de santé et l’éducation. En 2023, le nombre d’homicides signalés a augmenté de près de 120 % par rapport à l’année précédente et de plus de 600 % par rapport à 2018, avec 4 789 victimes enregistrées en 2023, dont 465 femmes, 93 garçons et 48 filles. De plus, le nombre de victimes de kidnapping est passé de 1 359 en 2022 à 2 490 en 2023, ce qui représente une augmentation de 83,2 %.
Le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme a rapporté que janvier 2024 avait été le mois le plus violent depuis plus de deux ans, avec au moins 806 non-participants aux confrontations violentes tués, blessés ou enlevés, ainsi qu’environ 300 membres de gangs, totalisant 1 106 personnes touchées – soit plus de trois fois le nombre rapporté en janvier 2023.
Le rapport des experts de l’ONU met en lumière une série d’incidents alarmants survenus en Haïti, révélant une situation de violence et de déplacement de grande ampleur dans différentes régions du pays. Ces événements, survenus sur une période allant de novembre 2023 à février 2024, mettent en évidence la détérioration continue de la situation humanitaire en Haïti.
Le rapport souligne également les violences qui ont éclaté dans la région de Mariani, entraînant le déplacement interne de 2 487 personnes au 6 novembre 2023. Mariani est une situation en évolution, dont les effets humanitaires s’étendent à d’autres régions du pays, en particulier le sud.
Les affrontements entre gangs, intensifiés depuis septembre 2023, représentent un autre aspect préoccupant de la situation. Les zones touchées, telles que la Cité Soleil, Belekou, Boston, Brooklyn, Pierre VI et Terre Noire, ont été le théâtre d’attaques meurtrières, causant la mort ou les blessures de 268 personnes rien qu’à la seconde moitié du mois de novembre 2023, dont 9 enfants. La plupart des victimes ont été ciblées lors d’attaques de style sniper. Ces affrontements ont également entraîné le déplacement de plus de 1 000 personnes.
Les litiges fonciers dans la commune d’Arcahaie, vers le 15 novembre 2023, ont également déclenché des affrontements meurtriers, entraînant la mort de 53 personnes et le déplacement de plus de 10 000 individus.
Au cours des deux premières semaines de 2024, près de 8 000 personnes, principalement des femmes et des enfants, ont été déplacées en raison d’affrontements dans les quartiers de Solino et Gabelliste de Port-au-Prince.
Environ 10 000 personnes déplacées internes ont fui les affrontements armés entre gangs à Carrefour, Cité Soleil et Tabarre entre le 5 et le 13 février 2024.
Le rapport souligne également les conditions difficiles auxquelles sont confrontées les personnes déplacées internes, telles que le manque persistant de nourriture et d’eau. La visite du Groupe à l’école Jean Marie Vincent à Tabarre, Port-au-Prince, le 20 janvier 2024, a révélé que cet établissement accueille 779 familles déplacées internes, totalisant plus de 3 000 personnes, dont 900 enfants.
Le 25 juillet 2023, la plupart des personnes déplacées internes ont fui les affrontements entre le gang Kraze Barye, dirigé par Vitelhomme, et le gang 400 Mawozo, dirigé par Lanmo Sanjou. De nouveaux affrontements ont entraîné de nouvelles vagues de personnes déplacées internes. Les témoignages obtenus par le Groupe ont révélé des tirs indiscriminés lors des affrontements de gangs, ainsi que des meurtres, des passages à tabac et des viols de femmes.
Le nombre de rapatriés haïtiens est également significatif. Selon les autorités de la République dominicaine, 497 692 Haïtiens sont retournés en Haïti en 2023, dont 246 678 sont retournés volontairement.
Ces événements ne représentent que des instantanés de la crise en cours en Haïti. Alors que les affrontements se poursuivent dans plusieurs régions du pays, le nombre de victimes continue de croître, mettant en évidence la nécessité d’une action urgente pour protéger les populations vulnérables et répondre à leurs besoins humanitaires essentiels.
Le rapport indique que la violence liée aux gangs entraîne une augmentation du nombre de personnes déplacées à l’intérieur du pays. En janvier 2024, le nombre total de personnes déplacées à l’intérieur du pays a dépassé 313 000. Sur les 146 584 personnes déplacées internes dans le département de l’Ouest, 139 853 se trouvent dans la région métropolitaine de Port-au-Prince.
Plus de 60 % de tous les déplacements forcés ont eu lieu en 2023, et 94 % des personnes déplacées internes venaient du département de l’Ouest, la ville capitale étant le principal point de départ. Tout le sud du pays a également été affecté par la violence dans la région métropolitaine de Port-au-Prince.
Selon le document, les gangs utilisent systématiquement la violence sexuelle pour exercer un contrôle sur les communautés, ciblant des femmes et des filles dès l’âge de 3 ans avec des embuscades et des viols collectifs.
Les cas sont sous-déclarés en raison de la stigmatisation, du manque de confiance dans la police et la justice et de la crainte de représailles. Cela entrave les efforts de poursuite. De plus, les défis liés à la collecte de données entravent la compréhension du phénomène.
D’après le document des experts onusiens, les enfants en Haïti sont confrontés à de graves violations des droits de l’homme et à des conditions mettant leur vie en danger, marquant une crise historique exacerbée par l’instabilité politique, la pauvreté, les épidémies de maladies, la malnutrition, les catastrophes naturelles et la violence armée croissante. Cela a entraîné le déplacement de près de 170 000 enfants à l’intérieur du pays et plus de 3 millions d’enfants ayant besoin d’aide humanitaire.
Les enfants dans les zones contrôlées par les gangs courent le risque non seulement d’être blessés ou tués lors des affrontements, mais aussi d’être entraînés dans les gangs en raison du manque d’opportunités socio-économiques et éducatives.
Selon le document, depuis la mi-janvier 2024, des troubles sociaux généralisés ont entraîné la fermeture temporaire de plus de 1 000 écoles à l’échelle nationale, affectant particulièrement les départements de l’Ouest, de la Grand-Anse, du Nord-Est, des Nippes et de l’Artibonite.
Des sources confidentielles provenant de zones contrôlées par les gangs ont indiqué que la plupart des enfants rejoignaient les gangs par nécessité économique. Après une période probatoire, pendant laquelle ils sont observés par d’autres membres du gang, ils se voient confier de petites tâches, telles que le contrôle des points de contrôle ou la surveillance et l’espionnage de victimes potentielles de kidnapping.
Le rapport de l’ONU souligne l’urgence d’une action concertée de la communauté internationale pour répondre à cette crise humanitaire en Haïti. Il appelle à des mesures immédiates pour protéger les droits et la sécurité des citoyens haïtiens et pour apporter une assistance humanitaire vitale à ceux qui en ont désespérément besoin.