Commémoration ce 28 juillet du triste anniversaire de la première occupation américaine d’Haïti de 1915…

Image d'archives de la periode de la premiere occupation americaine d'Haiti...

PORT-AU-PRINCE, dimanche 28 juillet 2024– Le 28 juillet marque un sombre anniversaire dans l’histoire d’Haïti. Il y a 109 ans, en 1915, les troupes américaines débarquaient à Port-au-Prince, entamant une occupation militaire qui allait durer 19 ans. Cet événement tragique a laissé des cicatrices profondes sur le tissu social, économique et politique du pays, dont les répercussions se font encore sentir aujourd’hui.

Au début du XXe siècle, Haïti traversait une période de grande instabilité politique. Depuis son indépendance en 1804, le pays avait connu une série de coups d’État et de gouvernements éphémères. Cette situation chaotique inquiétait les États-Unis, qui craignaient que leurs intérêts économiques et stratégiques dans la région ne soient menacés.

En juillet 1915, la situation à Port-au-Prince était explosive. Le président haïtien Vilbrun Guillaume Sam, confronté à une insurrection armée, fit exécuter 167 prisonniers politiques. Cette action radicale provoqua une réaction violente de la population, qui lyncha Guillaume Sam dans les rues de la capitale. En réponse à ce climat d’anarchie, le président américain Woodrow Wilson ordonna le débarquement des marines américains le 28 juillet 1915.

L’occupation américaine fut marquée par une série de réformes imposées par les autorités militaires. Les États-Unis prirent le contrôle de la Banque nationale d’Haïti et de ses douanes, garantissant ainsi le remboursement des dettes haïtiennes aux créanciers étrangers. La Constitution haïtienne fut amendée en 1918 pour permettre aux étrangers de posséder des terres en Haïti, une mesure impopulaire qui accentua le ressentiment de la population locale.

L’occupation fut également caractérisée par une répression brutale des mouvements de résistance. Les marines américains mirent en place des forces armées locales, la Garde d’Haïti, pour maintenir l’ordre. Ces forces furent utilisées pour écraser les révoltes paysannes, notamment la rébellion des Cacos, dirigée par Charlemagne Péralte. Les méthodes employées incluaient des exécutions sommaires et des actes de torture, renforçant le climat de terreur.

Les conséquences de l’occupation américaine sur le développement d’Haïti furent profondes et durables. Sur le plan économique, la mainmise sur les finances du pays et les réformes imposées bénéficièrent principalement aux intérêts américains et aux élites locales, creusant davantage les inégalités sociales. L’agriculture traditionnelle fut négligée au profit de la production de cultures d’exportation, déstabilisant les économies rurales.

Politiquement, l’occupation affaiblit les institutions démocratiques haïtiennes. Le pays fut gouverné de facto par les autorités militaires américaines, et les présidents haïtiens qui se succédèrent pendant cette période furent largement considérés comme des marionnettes des États-Unis. Cette perte de souveraineté alimenta un sentiment de nationalisme et de résistance qui persiste encore aujourd’hui.

L’occupation de 1915 n’a pas été la seule intervention américaine en Haïti. En 1994, dans le cadre de l’opération “Uphold Democracy”, des troupes américaines furent de nouveau déployées pour rétablir Jean-Bertrand Aristide, le président démocratiquement élu, chassé du pouvoir par un coup d’État militaire en 1991. Cette intervention visait à stabiliser le pays et à promouvoir la démocratie, mais elle souligna également la dépendance continue d’Haïti à l’égard des puissances étrangères pour résoudre ses crises internes.

Aujourd’hui, Haïti traverse une nouvelle crise politique, économique et humanitaire. L’assassinat du président Jovenel Moïse en juillet 2021 a plongé le pays dans une incertitude profonde. Les gangs armés contrôlent une grande partie du territoire, et les institutions étatiques sont dysfonctionnelles. La population souffre de la violence, de la pauvreté et de l’insécurité alimentaire.

L’interférence américaine dans les affaires haïtiennes a été constante, exacerbant les crises successives du pays. Cette ingérence a souvent sapé les efforts de développement local et a contribué à maintenir Haïti dans un état de dépendance. La commémoration du 28 juillet rappelle non seulement les souffrances passées, mais aussi les défis présents. Elle est un moment de réflexion sur l’impact des interventions étrangères et la nécessité pour Haïti de trouver des solutions durables et autonomes à ses problèmes.

Aujourd’hui, Haïti a perdu sa souveraineté et est censé être placé sous tutelle internationale. Les États-Unis ont sous-traité la question de la sécurité avec le Kenya et la question politique avec la CARICOM, laissant les Haïtiens continuer de subir les conséquences de la politique étrangère des États-Unis, généralement jugée raciste. Les États-Unis ont toujours supporté des régimes autoritaires, sanguinaires et corrompus, ayant conduit le pays à la faillite. Cette date symbolique est un appel à la mémoire collective et à la résilience d’un peuple qui aspire à la paix, à la justice et à la dignité.