PORT-AU-PRINCE, vendredi 27 mai 2022– Au moins 1 700 migrants haïtiens, dont 76 enfants et une douzaine de femmes enceintes, ont été expulsés par la République dominicaine au cours des deux dernières semaines, a rapporté vendredi le Groupe de soutien aux rapatriés et aux réfugiés (GARR).
Le GARR, une ONG haïtienne, a dénoncé le fait que les Haïtiens sont soumis à une « campagne de persécution » de la part des autorités dominicaines, qu’il a accusées d’avoir commis « de nombreuses violations des droits de l’homme ».
Plusieurs migrants sont arrivés en Haïti « avec des signes évidents qu’ils ont subi des violences physiques » et beaucoup d’entre eux ont signalé qu’ils étaient détenus à leur domicile ou dans leur travail, auxquels les agents de l’immigration ont eu accès sans autorisation judiciaire.
Parmi les personnes expulsées figurait une femme enceinte de huit mois qui a témoigné avoir été « brutalement battue et giflée à plusieurs reprises » au moment de sa détention et a ensuite été détenue pendant trois jours avant d’être envoyée à la frontière.
La semaine dernière, les autorités de la République dominicaine ont lancé une vaste opération contre les immigrants sans papiers à Ciudad Juan Bosch, une nouvelle ville construite en l’honneur de l’ancien président dominicain Juan Bosh où vivent de nombreux haïtiens.
Le 18 mai, un groupe d’Haïtiens a jeté des pierres contre des agents des migrations et, un jour plus tard, la Direction générale des migrations (DGM) a répondu par l’arrestation de 385 Haïtiens dans ce secteur.
L’opération s’est poursuivie ces derniers jours et, selon des militants, il y a eu des arrestations arbitraires de détenteurs de statut de résidents et d’autres disposant de visa et d’un permis de séjour.
Plusieurs organisations, dont le Centre pour le développement durable (CEDESO) et le Centre pour l’observation des migrations et le développement social dans les Caraïbes (OBMICA) ont condamné les opérations vendredi, considérant qu’il s’agissait de « violations des garanties d’une procédure régulière dans le domaine des expulsions ».
« Le déploiement disproportionné de la police et de l’armée » effectué par la DGM « a conduit à la persécution et à l’emprisonnement de centaines de migrants » dans des opérations « qui violent les procédures établies dans la Constitution dominicaine, la loi générale sur les migrations et les accords internationaux », indique un communiqué conjoint de ces organisations.
Le porte-parole de l’association des Haïtiens résidents à la ciudad Juan Bosh, Méthélus Estimé a critique jeudi dans une interview a RHINEWS, ‘‘le comportement des représentants d’Haïti à Saint-Domingue qui, a-t-il dit, sont informés de la situation, mais se sont abstenus de porter assistance aux haïtiens victimes ».
Il a dénoncé également le silence du gouvernement haïtien sur cette situation où des ressortissants haïtiens sont difficultés et ne bénéficient d’aucune assistance des autorités de leur pays.
« Nous n’avons aucun recours légal face à ce qui semble à une conspiration. Tout ce que nous pouvons faire, c’est de solliciter la solidarité internationale en vue de protéger nos droits », a déclaré Estimé.
Roudy Joseph, défenseur des droits humains, s’est plaint aussi du silence des autorités haitiennes sur ce dossier crucial.
« Personne ne nous assiste dans nos difficultés. Personne au niveau du gouvernement d’Haïti ou de l’ambassade d’Haïti en République Dominicaine ne dit mot. Nous sommes livrés à notre triste sort, nous comptons sur Dieu pour nous aider dans cette traversée du désert », a déclaré, désemparé, Roudy Joseph qui a souligné qu’à part les groupes racistes, il n’y pratiquement pas un problème profond de cohabitation entre le peuple dominicain et les haïtiens.