Attaque de bandits contre les nouveaux bâtiments de l’HUEH : un coup dur pour la santé publique

Par Jude Martinez Claircidor

 

PORT-AU-PRINCE, mardi 23 avril 2024– Cette semaine, des bandits affiliés au regroupement « Viv Ansanm » ont attaqué les nouveaux bâtiments en construction de l’Hôpital de l’Université d’État d’Haïti (HUEH), un projet en cours depuis 14 ans. Les dégâts causés par cette attaque n’ont pas encore été officiellement évalués, mais ils représentent un sérieux revers pour un processus de construction déjà longtemps entravé par les troubles sociaux et politiques. Cette situation aggrave les défis pour mettre en service cet hôpital et répondre aux attentes de la population, qui a été préoccupée par les retards dans la construction de l’HUEH depuis le séisme de 2010.

Cette attaque s’inscrit dans une série d’incidents récents, comprenant notamment l’attaque contre la Faculté de Médecine adjacente, ainsi que celle enregistrée la semaine dernière ciblant le bâtiment de l’Hôpital de Transition situé à la rue Saint-Honoré, ainsi que les cliniques et pharmacies environnantes.

Elle porte un coup aux efforts financiers déployés par toutes les parties prenantes pour la construction de cet hôpital. Le budget initial alloué à ce projet s’élevait à 102,4 millions de dollars américains. Les partenaires internationaux s’étaient engagés à contribuer au financement : la France avait promis 40,3 millions de dollars US, le gouvernement américain cofinançait à hauteur de 35 millions de dollars US et le gouvernement haïtien s’engageait à verser 27,1 millions de dollars US.

En termes de travaux, environ 22 000 m² de nouvelles surfaces ont été réalisées, et 7 000 m² ont été renforcés et rénovés. Douze bâtiments ont été érigés, comprenant une sous-station électrique, une station de traitement d’eau potable et une station d’épuration des eaux usées. Ces bâtiments, construits sur trois niveaux, présentent une complexité technique avec différents corps de métier intervenant (gros œuvre, plomberie, électricité, etc.).

Implanté sur un terrain de 5,7 hectares au sud de la rue Saint-Honoré, l’HUEH comprend des bâtiments dédiés aux soins ambulatoires, un bloc opératoire, des infrastructures d’hospitalisation, des espaces administratifs, techniques et résidentiels pour le personnel. Il est également doté de zones de stationnement, d’espaces verts, et d’installations pour la gestion des déchets médicaux et des eaux usées.

L’hôpital devra offrir un large éventail de services de santé, comprenant des centres de prélèvements, des consultations pour les maladies courantes et le VIH, des services de chirurgie, d’obstétrique et de gynécologie, ainsi que des laboratoires pour les analyses.

L’objectif est de prendre en charge diverses pathologies, allant des affections pulmonaires aux urgences obstétriques, en passant par les maladies cardiovasculaires, gastro-entériques, ORL, chirurgicales et gynécologiques.

Avec ses 524 lits, l’HUEH est destiné à devenir un établissement de santé de premier plan, équipé des technologies les plus avancées et répondant aux normes internationales. Cependant, sa route vers la réalisation de cet objectif est semée d’embûches.

Les travaux de construction sont entrepris par la firme Groupement International Santé pour Haïti (GISH), avec un contrôle de qualité assuré par l’entreprise de supervision TechniPlan, en collaboration avec l’Unité Technique d’Exécution du Ministère de l’Économie et des Finances (UTE-MEF).

Malheureusement, le chantier a été marqué par des retards significatifs, notamment en raison de retards de paiement et des pertes subies en raison du climat instable du pays. En 2019, le groupement en charge de la construction avait même envisagé d’abandonner le projet. Cependant, grâce à des négociations intensives, les travaux ont repris pour redonner vie à cet établissement crucial pour la santé publique haïtienne.

L’HUEH a été gravement endommagé lors du séisme de 2010, entraînant la signature d’un accord tripartite entre le gouvernement haïtien, la France et les États-Unis pour sa reconstruction. L’objectif était de restaurer sa fonction d’hôpital de référence et de répondre aux besoins de santé de la population de Port-au-Prince.

La gestion du projet est sous la responsabilité du Ministère de l’Économie et des Finances, avec un comité de pilotage impliquant plusieurs parties prenantes essentielles, dont le Ministère de la Santé Publique et de la Population, l’USAID, l’AFD et l’UTE-MEF. Cependant, l’attaque contre les nouveaux bâtiments ne fait qu’accentuer les nombreux défis déjà rencontrés par le nouvel hôpital. Le principal défi reste la disponibilité des ressources financières nécessaires pour assurer son bon fonctionnement. De plus, la sécurité de la zone environnante, abritant des institutions importantes comme le Palais National et les ministères, reste une préoccupation majeure.

Il est impératif que les autorités haïtiennes intensifient leurs efforts pour surmonter les défis actuels et garantir que l’HUEH soit pleinement opérationnel dans les meilleurs délais. La santé publique ne peut pas attendre, et la sécurité des installations médicales est une priorité absolue pour assurer le bien-être de la population.