Plus d’un mois s’est écoulé depuis que Jovenel Moïse, ancien président jusqu’au 7 février 2021, a été assassiné dans la nuit du 6 au 7 juillet dernier, dans sa chambre, en sa résidence a Pèlerin 5.
Les circonstances exactes de cet assassinat qui serait l’œuvre d’un commando de mercenaires colombiens et d’américains originaires d’Haïti, selon les autorités haïtiennes, ne sont toujours pas connues.
L’enquête préliminaire de la direction centrale de la police judiciaire et les différents témoignages de la veuve du président Martine Moïse, n’ont pas permis de faire le jour sur un ensemble de questions fondamentales, telles que : Qui a tué Jovenel Moïse ? Pourquoi ? Comment la scène s’était-elle produite entre autres ? Le rapport d’enquête du RNDDH qui recommande que les auteurs intellectuels de l’assassinat de l’ancien président soient identifiés et déférés devant la justice, met en relief également l’irresponsabilité de ceux qui ont eu la charge de sa sécurité. Ceux-ci l’ont livré, selon le RNDDH…
Port-au-Prince, samedi 21 août 2021- Dans son rapport, le réseau national de défenses des droits humains (RNDDH) est clair sur l’assassinat de l’ancien président, Jovenel Moïse, survenu dans la nuit du 6 au 7 juillet 2021, dans sa chambre, en sa résidence privée a Pèlerin 5.
L’organisme de promotion et de défense des droits humains estime que Jovenel Moïse a tout simplement été livré par les responsables de son service de sécurité.
‘‘Pour mettre en œuvre leur plan macabre, écrit le RNDDH, les auteurs intellectuels et matériels de cet assassinat ont pu compter sur l’appui d’au moins deux (2) des responsables de la sécurité présidentielle, savoir le commissaire divisionnaire Jean Laguel Civil et le commissaire municipal Dimitri Hérard, respectivement coordonnateur de la sécurité générale du président et responsable en chef de l’USGPN. L’inspecteur principal Paul Eddy Amazan et le commissaire de police Pierre Osman Léandre, eux-mêmes responsables en chef de l’USP et du Cat Team, n’étaient en fait plus impliqués dans l’organisation de la sécurité de feu Jovenel Moïse, ce dernier ayant décidé d’accorder toute sa confiance à ceux-là mêmes qui l’ont trahi, désorganisant ainsi le travail de l’USP et du Cat Team.’’
Le RNDDH estime qu’il s’agit d’un cas flagrant de violations des droits à la vie et à la sécurité du feu président de facto Jovenel Moïse, perpétrées par des personnes investies d’autorité de l’Etat qui avaient été chargées de protéger la victime.
Analysant la thèse selon laquelle des ressortissants colombiens ont été recrutés pour assurer la sécurité de Christian Emmanuel Sanon, le RNDDH souligne que ces derniers avaient sciemment accepté de participer à une mission illégale visant à procéder à l’arrestation d’un ‘‘président en fonction,’’ sachant qu’ils ne faisaient pas partie de l’INTERPOL. ‘‘Ils avaient sciemment accepté d’être impliqués dans un cas flagrant d’attentat à la sûreté intérieure de l’Etat haïtien, aujourd’hui aggravé par l’assassinat d’un président en fonction, soutient l’organisme des droits de l’homme.
Selon le RNDDH, ‘‘si la mission connue par la majorité des membres du commando avait été de procéder à l’arrestation de Jovenel Moïse, quelques autres membres savaient que la victime allait être assassinée.’’ Le RNDDH en veut pour preuve le fait que le président de facto Jovenel Moïse avait été dûment identifié avant d’être criblé de balles. On n’administre pas douze (12) à quinze (15) projectiles à une personne dont l’assassinat n’avait pas été prévu.
Notant que les noms de neuf (9) colombiens sont cités comme étant ceux qui se sont introduits dans la résidence présidentielle puis dans la chambre de la victime, le RNDDH rappelle que deux (2) d’entre eux ont été par la suite tués. Selon les autorités policières, cela s’est passé lors d’échanges de tirs. Sur ce point, c’est à l’inspection générale de la Police Nationale d’Haïti (PNH) qu’il reviendra d’élucider les conditions dans lesquelles ces individus ont été tués, suggère l’organisation.
‘‘Mais, quant aux sept (7) autres ressortissants colombiens qui avaient investi la résidence présidentielle, ils sont tous directement impliqués dans l’assassinat du président. Ils étaient, sans conteste, ceux qui savaient que le président de facto Jovenel Moïse allait mourir,’’ écrit le RNDDH dans son rapport.
‘‘Tenant compte des alertes sur les menaces qui avaient été lancées à l’encontre du président, le RNDDH conçoit mal que les différents services d’intelligence du pays n’aient pas été mis en branle. De même poursuit-il, il est incompréhensible que, sur alerte maximale, tous les responsables des unités spécialisées affectées à la sécurité du président de facto, se trouvaient chez eux.’’
Le rapport pointe du doigt les ministres de l’intérieur de l’époque, Louis Gonzague Day, et de la justice, Rockfeller Vincent, les responsables des services d’intelligence, le directeur général de la police, Léon Charles entre autres qui n’auraient pas fait ce qu’ils devraient faire pour empêcher l’assassinat du président de fait, Jovenel Moïse.
Le document souligne que Joseph Félix Badio dont le téléphone émettait aux environs de la maison de Jovenel Moïse, était en contact serré avec plusieurs personnalités. ‘‘Par exemple, le soir-même de l’assassinat, le premier ministre Ariel Henry s’est entretenu par téléphone tant avec Joseph Félix Badio, recherché par la police dans le cadre de l’assassinat de l’ancien président, qu’avec le président.’’
Le RNDDH estime que Martine Moïse, épouse du feu président de facto Jovenel Moïse, détient des informations beaucoup plus précises quant à l’assassinat de son mari que ce qu’elle a bien voulu partager notamment avec la presse internationale, à laquelle elle a fait d’ailleurs des déclarations dont certaines tiennent difficilement la route.
Plus que tout, le RNDDH estime que le fait par elle d’avoir exigé du ministre de la Justice Maître Rockfeller Vincent, l’arrestation de Joseph Félix Badio, laisse penser qu’elle dispose de précisions sur le niveau d’implication de ce dernier dans l’assassinat de son mari.
En guise de recommandation, le RNDDH appelle les autorités policières et judiciaires à identifier les auteurs intellectuels de l’assassinat de Jovenel Moïse, a les droits aux garanties judiciaires de tous les individus indexés dans cet assassinat, à toutes les phases de la procédure, à enquêter sur les conditions dans lesquelles les trois (3) ressortissants colombiens ont été tués par la Police Nationale d’Haïti (PNH) et sur les dénonciations de torture faites par les personnes arrêtées ; à transférer le dossier à un magistrat instructeur courageux, sérieux et capable de mener une enquête judiciaire méticuleuse et à protéger les greffiers qui étaient impliqués dans le processus d’enquête et qui sont aujourd’hui menacés.
Rap – Assassinat Jovenel Moïse – 082021 (1)