PARIS, vendredi 17 mai 2024– L’ordonnance rendue par le juge Morin dans l’affaire Romel Bell suscite de nombreuses interrogations quant à la qualité intellectuelle des décisions judiciaires des juges de siège face aux nouvelles régulations introduites par le décret du 4 mai 2023 relatif au blanchiment d’argent et autres infractions, édicté sous le gouvernement du Premier ministre Ariel Henry.
Analysant l’ordonnance du magistrat Jean Wilner Morin a la lumière du décret de mai 2023,. Me Guerby Blaise, docteur en droit pénal et politique criminelle, déclare : « Si cette ordonnance est confirmée par la Cour d’Appel, elle mettra à l’épreuve la capacité des juges à naviguer les complexités de ce décret controversé. »
Le décret du 4 mai 2023, poursuit-il, ‘‘loin d’instaurer une structure judiciaire cohérente, plonge le système dans une véritable anarchie. Il s’agit d’une menace directe à l’ordre public économique et ouvre la porte à des abus judiciaires contre des professionnels et des figures politiques. Les alliés de l’ancien Premier ministre pourraient bien se trouver en difficulté, victimes des dispositions qu’ils soutiennent aveuglément’’, soutient-il.
Selon lui, face à ce décret jugé dévastateur, les principaux intéressés observent un silence étonnant, préférant se concentrer sur des luttes de pouvoir stériles. ‘‘Cette absence de réaction critique est préoccupante, car le renforcement de la répression pénale, bien que visant à lutter contre des menaces comme le terrorisme et le blanchiment d’argent, ne doit jamais se faire au détriment des droits et libertés fondamentaux, comme le stipule le droit international.’’
Le Dr Blaise estime qu’il est impératif que les textes normatifs puissent être discutés sans peur, entre le gouvernement haïtien et la communauté internationale, afin de respecter le principe de légalité. Or, ce décret souffre de nombreuses incohérences. Il abolit et maintient simultanément des institutions para-judiciaires existantes, créant une confusion totale. Par exemple, l’UCREF est à la fois maintenue et supprimée, et un nouvel organe, BUGAG, remplace BAFOS sans clarifications suffisantes.
Il affirme que les articles 98, 102, 112 et 114 de ce décret transforment le Ministère de la Justice en une autorité de poursuite et de jugement, conférant au ministre des pouvoirs quasi-dictatoriaux. Cela ouvre la porte à des abus potentiels, tels que le chantage pour extorquer de l’argent aux personnes sanctionnées par les Nations Unies.
‘‘Il est à espérer que les alliés civils ou les autorités publiques ne se plaindront pas lorsque le ministre de la Justice utilisera ces pouvoirs pour confisquer abusivement leurs biens. Il est également inquiétant de voir que certains conseillers juridiques de l’ancien Premier ministre Ariel Henry continuent d’exercer une influence’’, selon Dr Guerby Blaise.
‘‘Pour que la justice haïtienne puisse évoluer de manière positive, il est crucial que le nouveau Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ) soit composé de juristes compétents, objectifs et crédibles. Ils devront guider le prochain ministre de la Justice vers une administration plus juste et équitable’’, recommande-t-il.
« Pour ma part, j’ai constamment dénoncé cette anarchie judiciaire. Mes critiques sont intégrées dans la version condensée de mon livre, fruit de six années de recherche doctorale à l’Université Paris Nanterre, où j’ai complété mes études de droit. Cette analyse se veut un appel à une réflexion approfondie et à une réforme judicieuse des mécanismes juridiques en Haït », déclare-t-i en fin d’analysei.
À propos de Guerby Blaise:
Il est docteur en Droit pénal et Politique criminelle en Europe, Droit privé et Sciences criminelles
Élève-avocat finissant à la Haute École des Avocats Conseils de la Cour d’Appel de Versailles (HEDAC)
Avocat au barreau de la Croix-des-Bouquets